Les Saintes

Les Saintes
ilet Cabri

mardi 14 mai 2013


 

 

 

* Le voyage d’Erreip.

 

 

LEXIQUE: Pour les non-initiés à la pratique maritime :

 

La distance > 1 mile nautique = 1.852 mètres

 

La vitesse > 1 nœud = 1 mile nautique par heure (soit 1km 852 à l’heure…)

 

Le pied > environ 30 centimètres = utilisé pour exprimer usuellement la longueur d’un navire.

(Et accessoirement peut indiquer au singulier la mesure de plaisirs divers ou variés.)

 

BMS > Bulletin Météo Spécial (Avis de grand frais, vent de force 7)

 

L’échelle Beaufort : état de la mer et du vent.

 

Force 0 > 1 nœud de vente correspond  à une mer d’huile, comme un miroir (la pétole, quoi…)

Force 1 > 1 à 3 nœuds de vent = mer ridée (cool)

Force 2 > 4 à 6 nœuds de vent = vaguelettes

Force 3 > 7 à 10 nœuds de vent = petits moutons (blancs) sur la mer

Force 4 > 11 à 16 nœuds de vent = nombreux moutons (toujours blancs)

Force 5 > 17 à 21 nœuds de vent = vagues et embruns

Force 6 > 22 à 27 nœuds de vent = lames et crêtes d’écume étendues

Force 7 > 28 à 33 nœuds de vent = lames déferlantes, éviter de sortir du port (avis de grand frais)

Force 8 > 34 à 40 nœuds de vent = les crêtes des vagues partent en tourbillons d’écume

Force 9 >41 à 47 nœuds de vent = pareil en pire

Force 10 > 48 à 55 nœuds de vent = tempête, les embruns obscurcissent la vue

Force 11 > 56 à 63 nœuds de vent = on n’y voit plus rien

Force 12 > 64 nœuds de vent et plus = Ouragan, (les enfants de moins de 12 ans s’envolent…)

Plus que force 12 > (même des fois moins…) = coule….

 

(Autant dire qu’à partir d'une certaine force de vent, en fonction du bateau et de son équipage la sagesse et la prudence imposent de rester au bistrot…..sécurité, sécurité….)

 

Et surtout à bord,

Ne jamais… JAMAIS…. JAMAIS…. prononcer le nom d’un animal que l’on trouve généralement dans des clapiers et qui se nourrissent de carottes.

Ca peut porter malheur….A ceux qui en sont persuadés.

 

 

 

 

*      1) Les débuts.

 

Mon premier bateau je l'ai construit moi-même, avec une feuille A4, je crois, il était en papier, mais y a longtemps…Très longtemps, ensuite, c'est bien plus tard… Que j’ai acheté un petit voilier de 5.50 m transportable sur sa remorque, un EDEL V, qui m’a permis de débuter véritablement, sur l’eau plate des lacs d’Auvergne d'abord, avant de me mettre à l’eau salée au large de Fouras et à la Rochelle durant les quelques années où je l’ai utilisé.

 

J’ai également fait du voilier à l’occasion d’un stage aux "Glénans" en Bretagne sud sur un habitable, un "Dufour 30". En boucle de Concarneau à Lorient en passant par l'archipel des Glénans et l'île de Groix, puis retour.

 

(Le club des voileux)

 

Le club " A.P.C" (Auvergne Plaisance Croisière) basé à Clermont Ferrand, en Auvergne, est celui avec qui j'ai pu passer les permis de navigation côtier et hauturier, puis le certificat restreint de radiotéléphoniste "CRR" , indispensable pour utiliser la radio "V.H.F." à bord, l’organisation de ce club permettant aussi de pouvoir louer des voiliers chez les professionnels pour aller naviguer sur  l'ensemble du littoral métropolitain.

 

 J’ai pu de la sorte, bénéficier durant plusieurs années d’une aide précieuse et avec le soutien des bénévoles du club au maniement des voiliers.

 

Peu après ma retraite professionnelle, je suis allé au salon nautique à Paris me renseigner sur les voiliers, mais en voyant les prix pratiqués: (Aïe, ça pique les yeux !…) je me suis rendu compte que "ça va pas l'faire" !….

Sur le salon, un vendeur de marque m'a alors conseillé une bonne occase qu'il avait dans le sud de la France…Et c'est comme ça qu'avec un ami d'A.P.C. qui s'y connait, je suis allé voir mon futur voilier.

 

J’ai acheté "ERREIP" début 2007 au Cap d’Agde, c’est un voilier "Jeanneau Sun Odyssey 32" de 9.50 mètres, datant de 2004, que j’ai nommé "ERREIP"  (A l’envers, c’est mon prénom et dans l’autre sens c’est le bateau, ou le contraire …) Puis "Pierre" ça peut couler mais l’inverse, ça flotte, c’est bien connu…Et "Pierre" qui roule n’amasse pas mousse, mais moi j’avais besoin d’un mousse (d'une mousse en réalité).

 

Ce sera Ghislaine, celle que j’emmène, qui m’accompagnera dans cette aventure là.

Pour que tout s’enchaine, sans beaucoup de peine, celui qui l’aidera, sera toujours moi.

Et sur les mers lointaines, en affrontant le vent, tout deux partiront trouver l’aventure.

D’où qu’elles viennent, les vagues certainement, nous porterons toujours vers l’azur.

 

 

(C'était avant)

 

A bord d’"ERREIP",  j’ai déjà navigué dans le golfe du Lion avec des copains. Puis en Corse avec Alain, un ami expérimenté du club de voile "APC " dont nous faisons partie. La traversée s'est très bien passée, le séjour également, par contre la météo nous a surpris au retour avec des conditions qui ont été dantesques, des vagues d'une hauteur encore jamais vues, ni revues heureusement, avoisinant les 8 ou 10 mètres qu'il a fallu négocier une par une avec le sentiment que le bateau n'allait pas arriver jusqu'en haut tellement elles étaient abruptes, ensuite c'est la descente, un peu comme dans un parc d'attraction, un genre de montagnes russes mais dans l'eau et sans les rails…Impressionnant!

 

Je suis également parti aux Baléares pendant quelques jours avec deux amis ( Claude et Daniel dit "Dada" ) que je connais depuis longtemps et qui sont deux frères, ils possèdent une bonne expérience en navigation dont j’ai pu profiter en partant pour Majorque, notamment lors d'un violent orage qui nous a rattrapé de nuit,  grondant de plus en plus, Dada (qui est féru de moto) estime que ça va tomber juste "sur les sacoches", mais non, car ça s'amplifie et bientôt c'est un déluge d'éclairs qui entoure le bateau, on se croirait dans un court circuit,  très rapidement la grêle succède à la pluie dont les grêlons deviennent de plus en plus gros et tombent de plus en plus forts, à la barre, je dois me protéger la tête avec une main, puis une casquette dont la protection reste dérisoire, ils me gratifient d'un œil au beurre noir, le vent devient un tourbillon, plus le temps de finir de rentrer les voiles, soudainement des rayons lumineux rouges en forme de treillis traversent le cockpit , tous les instruments de navigation s'éteignent et le bateau se couche sur le coté, une masse d'eau salée traverse le cockpit, la mer est déchainée, puis le bateau se redresse, la pluie qui succède "écrase" la mer qui devient plus calme et nous retrouvons le cap à l'aide de lampes pour éclairer le compas. Au petit matin alors que les indicateurs de navigation ne fonctionnent toujours plus, je coupe l'alimentation générale de courant et la remet, ce qui à pour effet de tout réinitialiser, tout se remet à fonctionner, ouf !

 

Nous sommes partis avec Ghislaine tous deux pour La Corse, puis la côte Espagnole ensuite, c'est elle qui m’accompagne dans ce périple transocéanique et dont la rencontre s’est avérée décisive dans cet engagement de traversée de l'océan Atlantique pour les Caraïbes.

 

 

Je lui promets l’aventure, elle ne sera pas déçue…

 

 

(La préparation au voyage)

 

Depuis janvier 2010, notre projet prend forme, à défaut d’être bien sûrs de la "monture" qui nous mènera vers notre but, on visite d’autres bateaux dits de "grand voyage", mais dont le coût dépasse notre budget, et décidons donc de garder notre unité flottante en plastique polyester et fibre de verre mélangés, collés serrés par polymérisation structuré définitive à usage déterminé par avance dans un but de navigabilité aussi irréprochable qu'exemplaire si possible et de l’équiper au mieux, c’est ainsi qu’un régulateur d’allure permettant de voguer automatiquement et mécaniquement en fonction de la direction du vent lui sera greffé, puis d’une pile à combustible fonctionnant au méthanol qui donnera de l’électricité, des voiles neuves équiperons notre gréement, une robuste batterie de servitude type "gel", une radio VHF équipée d'un récepteur A.I.S.( qui permet de recevoir la position, le cap, la vitesse et la signalétique des cargos environnants équipés d'un émetteur afin d'éviter une collision avec ces bateaux qui se trouverait sur notre route ) et un Navtex (genre de fax électronique qui reçoit des messages météo) pour compléter, sans oublier une deuxième ligne de mouillage.. Malgré qu’un panneau solaire monté sur un portique avec une éolienne nous auraient été bien utiles, mais dépassent le budget financier passablement étriqué dont on dispose.

 

 

*      2) Le départ

 

Après les "coucous" d'adieu à la famille et aux amis, nous entamons le décompte du temps pour l'instant du départ, ça va être un grand moment, la décision est prise et la préparation est au niveau maximal, c'est-à-dire, ce qu'on peut de mieux avec nos moyens disponibles actuellement.

 

C’est le 11 septembre 2010 à 14 heures depuis le Cap d’Agde, port d’attache d’Erreip,  que l'on part tous les deux, pour la transat. La route prévue passera par l’Espagne, les Baléares, les Canaries et rejoindra ensuite le Cap Vert d’où nous nous engagerons pour cette traversée transocéanique jusqu’aux Antilles que l'on estime atteindre début 2011 et qui impactera durablement notre mémoire dans l'historique perso.

 

 

(Ca y est, ça commence…)

 

Depuis bien des aventures se sont déjà déroulées. Dès le premier soir, suivant le départ du Cap d’Agde, arrivés au mouillage près de Gruissan après 20 miles nautiques et 5 heures de route tranquille, sous un  petit vent de force 2 à 3, visibilité 5 sur 5, c’est un ressort de winch qui s'est cassé, (c’est tout petit et attention en démontant de ne pas perdre les pièces qui ne demandent qu’à passer par-dessus bord)…Je sors ma caisse à outils et parviens à tordre d'une façon aussi efficace que péremptoire ce qui reste du ressort abimé pour le faire fonctionner encore jusqu’au moment où je pourrais en trouver un neuf chez un shipchandler. Du coup  Ghislaine m’appelle " Mac Guyver ".

 

 

 

*      3) L’Espagne

 

(Les calanques Espagnoles)

 

Partis au lever du jour pour passer le cap Béar,  puis le cap Creus, avant un "BMS"(Bulletin Météo Spécial)  prévu, c'est après 55 miles et 11 heures de navigation dans un vent nord-est force 2,  passant sud force 3 se renforçant ensuite que nous arrivons à Cadaguès en Espagne le 12 septembre au soir, où ça passe à plus de 30 nœuds, force 7. Il faut prendre un corps mort, ces bouées fixées au fond de l’eau auxquelles on amarre le bateau sont obligatoires ici et moyennant finances, 30 euros par jour sans service ni d'eau, ni d'électricité. Nous resterons amarrés là deux nuits, à cause de la mauvaise météo qui empire, jusqu’à force 8 en rafales.

 

Enfin le 14 septembre on quitte ce mouillage dans une mer agitée pour 42 miles nautique avec du nord de force 5, en 9 heures de navigation jusqu’à Cala Gibarola, une petite calanque pour mouiller notre ancre pour la nuit, qui sera relativement tranquille. L'eau bleue donne envie de s'y baigner, mais autour des bateaux, un peu partout flottent de nombreuses méduses vertes et bleues avec des traces marron foncé qui nous en dissuadent, ce sera pour une autre fois…

 

 

(Le coup de la panne)

 

Tout est calmé le lendemain matin, alors que l'on fait route au moteur  par manque de vent, mais soudainement, c’est la panne au large de Blanés, , le moteur s’arrête instantanément, le peu d’air qui commence à souffler permet d’avancer à la voile jusqu’au port mais pas d’y entrer, nous sommes contraint de mouiller l’ancre devant l’entrée de la marina, très près de la jetée en rochers, le souffle sud-ouest alors se renforce de plus en plus, il passe à force 4 , puis 5, après appel par radio à la capitainerie on doit patienter deux à trois heures avant de voir enfin quelqu’un pour nous remorquer à l’abri du port.

 

Le peu de maitrise d’Espagnol ne me suffit pas pour communiquer convenablement. (Je sais dire: amigo ! Una cerveza, por favor !...Muchas gracias !) Manifestement il en faut plus pour bien se faire comprendre…  (D’ailleurs, je n’ai pas pu le placer…)

 

Techniques hasardeuses de remorquage par ceux venus du port qui avec leurs petites embarcations pneumatiques sous motorisées enchaînent beaucoup de fausses manœuvres, disposant de cordages trop petits, qu’ils échappent trop souvent et par grand vent cette fois, finalement un "marinero" que j'autorise à monter à bord décide qu'il faut cisailler notre chaîne et ancre qui s'est maintenant coincée au fond, et d’ abandonner le tout afin de libérer le bateau, je dois m’y résoudre et y attache un par-battage au bout de la chaîne qui reste dans l'eau afin de pouvoir venir récupérer le "tout" ensuite.

 

 C’est après beaucoup de difficultés que nous sommes remorqués avec les innombrables expositions aux collisions que nous éviterons avec les bateaux du port et tout de même enfin amarrés à une place dans la marina pour la nuit qui arrive.

 

Le lendemain, j’ai trouvé la panne au niveau d’une durite de carburant fuyante qui était  pliée et percée, je répare, puis nous voyons à l’entrée du port notre par-battage qui flotte tranquillement avec la chaîne et l’ancre dessous,  je n’aurais plus qu’à gonfler l’annexe pour aller chercher tout le mouillage qui est au bout, en attendant, allons prendre la douche et finissons de régler le prix de la marina et les papiers pour la déclaration à l’assurance au niveau du remorquage.

 

En revenant au bateau notre pare battage flottant à disparu…. C’est donc qu’entre temps quelqu’un l’a remarqué et s’est servi, manifestement, adieu bout de chaîne et ancre, partons d’ici au plus vite, j’irais ailleurs trouver où acheter une nouvelle chaîne ainsi qu’une ancre, pour un début ça commence plutôt mal….

 

 

(La mort du petit "Caddie")

 

Le 16 septembre au soir, arrivée à Barcelone, la marina est l’endroit où il sera possible de réparer alors, nous partons au shipchandler le plus proche, (le shipchandler c'est comme l'accastilleur, sauf que ça s'écrit pas pareil et ça se prononce différemment, le contraire existe aussi, à l'inverse et dans l'autre sens…) situé à quelques centaines de mètres du port, acheter 40 mètres de chaîne, malheureusement ils n’ont pas d’ancre de la taille dont le bateau à besoin et finalement c’est heureux car avec notre petit chariot de commissions nous emballons la chaîne neuve que nous venons d'acheter pour partir au port, mais qui vu son poids….C’est devant l’entrée du magasin qu'il rend l’âme et ses deux roulettes en même temps, du coup il faut faire appel à un taxi et mettre le tout dans le coffre  pour arriver à refaire la distance qui sépare le shipchandler du port,  puis de là je dois traîner le chariot par terre toujours avec le poids de la chaîne dedans pour finir les quelques dizaines de mètres restants qui manquent pour arriver au bateau, comme nous sommes sur un surplomb qui domine la marina je dévide la chaîne neuve d’une hauteur de deux étages mètres par mètres pour la récupérer plus bas et la tirer jusqu’au bateau…40 mètres de chaîne, c’est du lourd…

 

Dans une poubelle Espagnole on doit se séparer de notre petit "caddie" devenu méconnaissable, dont le châssis est entièrement plié, sans roulettes, le tissu troué, déchiré, son état de décomposition à venir ne laissant aucun doute sur son proche avenir, inexistant désormais."Este muerto", Adios " El Cadidos " ….mais l’aventure continue et l'on se doit de suivre notre programme prévu avec courage et dignité dont la détermination sans faille qui nous caractérise en cette mi-novembre fait l'admiration inconditionnelle de tous les membres de l'équipage, (c'est-à-dire de nous-mêmes...)

 

Nous restons trois jours à Barcelone et profitons de cette halte pour visiter la cité Catalane. Jolie ville, malgré la pluie pour la plupart du temps en ce presque début d'automne, on a beaucoup apprécié les Ramblas, l’étonnant  parc Güell, le temple de la Sagrada  Famillia (œuvre d’Antoni Gaudi démarrée en 1883, jamais terminé) et autres sites remarquables.

 

 

 

*      4) les Baléares

 

 

Après avoir réglé la marina Barcelonaise en fin de matinée du 19 septembre. Cap est mis sur les Baléares, 110 miles à faire, je compte 25 heures de navigation, donc une nuit en mer, la météo est bonne.

 

 

(La pêche à Gi)

 

Au large Ghislaine, grâce à sa ligne de pêche, attrape un maquereau (mort par inadvertance pour avoir confondu son met favori avec un leurre en plastique couleur fluo à 16 euros 90…) qui avec la coopération de la poêle à frire composera le menu du jour (le maquereau, pas le leurre…)

 

( Il faut dire qu’elle s’est entraînée à la pêche en même temps que des rudiments de conduite du bateau quand nous n’étions pas encore partis de France, c’est ainsi qu’une fois vers le Cap d'Agde avec des amis à bord elle a déjà mis sa traîne dans l’eau afin de s’essayer à la pêche, en attendant que ça morde, je lui ai demandé de tenir la barre en se concentrant pour tenir le cap, ce qu’elle fît avec beaucoup de d’application, pendant qu’un copain et moi-même remontions sa ligne et qui fût remise à l'eau ensuite, après y avoir accroché solidement et subrepticement une boite de maquereaux au vin blanc au bout de son fil sans qu’elle s’en aperçoive…. Nous lui avons alors demandé de ramener son matériel avec sa prise au bout, pendant que je la remplaçais à la barre…. Imaginez sa surprise en remontant sa "pêche"…)

 

 

(Les Baléares)

 

A l’arrivée sur l’île  de Majorque vers midi le lendemain, c'est à Sollers que l'on mouille l'ancre et débarquons en annexe au port où un sympathique petit train pittoresque avec des wagons en bois  nous emmène en ville, là où des maisons de pierres taillées qui témoignent des siècles passés, et même avant, sont légion.

 

Dans tous les cas, avant de partir en mer et après avoir pris connaissance de la météo à venir , il faut étudier les cartes marines papier (ou électroniques, grâce au traceur), qui donnent de précieuses indications sur la route à suivre, la configuration des atterrissages dans les ports, les marinas, ou les possibilités de mouillages, pour calculer nos déplacements, en prévoyant une vitesse de 4 à 5 nœuds en général, on doit appareiller tôt le matin pour arriver avant la nuit tombée.

 

Arrivés à Andreitx le 21 septembre, par un temps ensoleillé, 25 miles plus au sud de Majorque, le mouillage se fait dans une baie calme et paisible, un sanctuaire, où la lumière éblouissant le matin qui s'éveille fait se contraster les couleurs environnantes dont l’éclat lumineux est enchanteresque, c’est superbe, d'une étonnante beauté mouvante et animée selon la progression des heures avec des tons évoluant et changeants dans d'éphémères phases transitoires au fil du temps qui s'écoule, égrené par les heures qui passent, jouant avec les ombres des arbres séculaires nichés au creux de granitiques rochers dont l'imposante masse à demi ensevelie laisse émerger de sa partie visible, sa lourde et impressionnante monumentalité ancestrale.

 

 

 (L'air  "Dino")

 

Nous repartons le 22 septembre, doublant une île ressemblant étrangement à une immense créature allongée, (qui erre et serait similaire à un dinosaure de l'ère secondaire, une partie en mer, l'autre dans l'air dont le corps n'étant pas en chair émerge sur terre et semble se faire un bien cher sommeil pépère dans son repaire très ordinaire).

 

 

Nous prenons une photo virtuelle de la bête qui n'en est pas moins …"Virtuelle". Clic!...Heureusement le bruit de l'appareil photo ne le réveille pas… (On dit que les photographes sont des voyeurs, mais c'est un cliché…)

 

Changement d'île et direction d'Ibiza le 22 septembre où nous arrivons le soir, Dans un vent sud-est, 50 miles plus loin, sur une mer belle, mais un peu houleuse, le mouillage de Galera, situé au nord d’Ibiza dans une petite crique sera notre abri pour la nuit. Malgré une température encore estivale jusque là, la météo se détériore passablement, pluie et vent s’invitent désormais.

 

San Antonio les 23 et 24 septembre toujours à Ibiza, au soir devient très agité dans la nuit où un BMS reçu à bord sur notre Navtex nous indique une forte dépression dans la zone, au mouillage, les bateaux dont l’ancre dérape cette nuit là sont nombreux,  c'set un peu l'affolement, on entends des cris et l'on voit des voiliers qui cherchent à se ré-ancrer vers 3 heures du matin au milieu des nombreux bateaux présents, pris dans une agitation difficilement contrôlée par peur de collisions entre les navires présents, des équipages s’agitent, il faut fréquemment vérifier notre mouillage, mais avec plus de six fois la hauteur d’eau immergé il tient fermement et sans soucis, finalement il n’y aura aucun incident à l’issue de cette folle nuit.

 

Puis on quitte les Baléares le 25 avec un sud-est force 5 devenant 7 pour rejoindre de nouveau le continent Espagnol, plus au sud où la mer est très animée dans la nuit, cette fois c’est vraiment difficile car ce sont des lames croisées qui nous assaillent et pour les voir arriver dans la nuit, c’est pas gagné !… Je suis à la barre  et les vagues frappent la coque puis passent dans le cockpit, je suis trempé, des paquets d’eau de mer se jettent violement sur moi à la façon de "Bruce Lee" sur un méprisable Chinois gravement corrompu dans la gestion partisane de l'immonde organisation concernant la répartition du financement monétaire de son environnement local dans " la fureur du Dragon"  en version colorisé standard.

 

 

(Ca buffe!)

 

Puis comme le vent passe force 8 et change de direction, je dois maintenant regarder à l’arrière du bateau dans la lueur de la lune pour voir le sens dans lequel les vagues vont arriver, Ghislaine me donne des indications en criant « vague » à chaque fois qu’une est plus grosse que les autres, le bateau manque de se tourner en travers de nombreuses fois, mais il faut tenir bon. "Age quod agis, acta est fabula". Me dis-je en latin, et c’est pas souvent… (Ce qui veut dire: fais ce que tu dois faire, de toute façon, maintenant c’est ficelé…)

 

Nous croisons quelques cargos se dandinant lourdement et qui rajoutent des turbulences supplémentaires dans cette mer désordonnée,  je suis épuisé de cette navigation qui n’en finit pas, ça se traduit par des troubles de discernement et de clairvoyance, puis des hallucinations, j’entends des voix, je crois voir des dauphins transparents, ayant manifestement des troubles comportementaux, car se tenant par les nageoires en train de danser une ronde sur la mer devant le bateau, (bon,  j’y crois pas trop, mais gaffe quand même…)

 

 

(Altéa)

 

Enfin au petit matin, après quinze heures de navigation et 80 miles nautiques, les lumières du port d’Altéa se rapprochent "vaguement" mais n’en finissent pas d’arriver, un étrange balisage fait de feux blancs clignotants sont présents en approche du port, non répertorié dans signalisation internationale ils donnent à penser qu'il faut largement contourner la zone en avant de la marina, il doit s'agir de fermes marines.

 

Nous arrivons épuisés et enfin amarrés, on mange un p’tit bout et "dodo" alors, pendant mon repos j’entends une musique douce et reposante, je me dis, dans mon demi sommeil qui se veut réparateur et s'établit sans caisse à outils que c’est encore une hallucination auditive et que je suis dans un conflit intérieur brut non résolu de la gestion provenant de la fatigue harassante engendrée par la dernière navigation de nuit.

 

Je pense plutôt,  maintenant que c’était dû au concerto de l'adagio en "sol mineur" pour orgue, cordes et violons de Tomaso Albinoni, donné le soir vers le port (dans sa version  du Berliner Philharmonic Orchestra d'Herbert Von Karajan), c'était reposant,  j'ai bien aimé…

 

Visite d’Altéa le lendemain où une fête régionale consistant en un défilé costumé traversant la ville est organisé en l’honneur de la vierge Marie et son entourage compatissant, nous suivons la procession qui chenille jusqu’à son arrivée où le cortège atterri à l’église et ensuite papillonne, là  l'envol d'une messe marque la clôture des festivités et du spectacle, en cet endroit situé sur les hauteurs de la cité, la vue s'étire magnifique surplombant la mer jusqu'aux pieds du port où nous pouvons apercevoir notre bateau, bien sagement amarré sous un ciel pur, qui nous attend pour les prochaines étapes.

 

Le 27 septembre, poursuivant notre route avec le retour du soleil, c’est maintenant toujours plus au sud vers la province d’Alicante, à Torrevieja que  nous sommes arrivés ce soir,  on achète dès le lendemain matin notre ancre de 16 kgs chez un accastilleur tenu par des Français (toujours pratique quand il faut expliquer ce que l’on recherche à l'étranger sans maitriser totalement le langage local), ils nous indiquent où trouver du méthanol chez un de leur collègue qui se trouve encore plus au sud et sur notre route, introuvable jusqu’ici, ce carburant pour notre pile à combustible dont on a équipé le bateau avant de partir pour fournir de l’électricité à bord, reste cher et difficile à trouver.

 

Vers Cartagena, maintenant bercés par une belle mer, (c'est là que l'on peut se rendre compte de l'importance orthographique comparée à la transmission orale). Ah la belle mère !... La belle mer disais-je, avec un petit vent du sud au cul (et pas "Sudoku" pour les matheux)  au large de Carthagène, dans la province de Murcia.

 

Cette fois la température à chuté (il fait 26° au lieu des 28° habituellement), le ciel est sans nuages, puis se réchauffe doucement, (après arrêt à Aguillas pour faire le plein de carburant), l'ancrage pour la nuit se fait dans la jolie petite crique de Cala Salitrona le 29 septembre, peu de monde par ici, c'est un endroit bien protégé au milieu de rochers et la nature y est sauvage et authentique, le soleil dans sa grande mansuétude nous offre ses rayons, (thermostat 2 à 3 selon l’exposition), ainsi que la lumière resplendissante livrée avec, Il nous salue avant de se coucher dans un majestueux dégradé de teintes multicolores à faire pâlir une boite de crayons de couleurs.

 

Le 30 septembre toujours plus au sud, 45 miles plus loin, on arrive au  mouillage de Garrucha près d’un petit port de pêche, ces étapes sont espacées d’une quarantaine de miles qui permettent d’en faire le parcours dans la journée.

 

Je vois mon premier poisson volant, un "exocet" qui plane sur plus de 200 mètres de longueur et à quelques centimètres de hauteur avant de disparaitre dans les remous liquides méditerranéen qui l'enveloppent en un petit plouf caractéristique agrémenté d'éclaboussures de circonstances, prévisibles dans ces conditions de démarche opérationnelle suite à cette procédure d'immersion d'urgence en milieu aquatique sous ces latitudes approchant les 36 degrés Nord et quand y fait beau….

 

 

(Pas gai)

 

Puis à 35 miles de là, c’est dans la baie de San José,  près d’Almeria en Andalousie que nous mettons notre ancre le 1er octobre à la tombée du jour, ici au pied des dunes les plages de sable sont admirables, la flore spécifique y est parsemée entre autres, de cactus et d'aloès où le chant des grillons se fait entendre et résonne par delà les limites de la végétation, les maisons aux toits terrasses blanchies à la chaux, plantés dans la chaleur Andalouse, sont typiques du sud Espagnol au climat torride qui règne pendant les heures où le soleil au zénith sévit en périodes de saisons chaudes qui marquent ce climat méridional caractérisé.

 

Là il faut gonfler l'annexe pour débarquer et aller faire des courses d'avitaillement en ville, mais le moteur de hors bord refuse de démarrer, nonobstant ma volonté farouche, conjuguée à la fois de mes efforts inconditionnels et de mon aversion à partir à la rame resteront néanmoins stériles, car le moteur exclut d'amorcer ne serais ce qu'un semblant de cycle à 4 temps nourrit au sans plomb 95 et pourtant prévu dans le manuel technique fourni dès l'achat de l'appareil, la bougie est  sûrement noyée et malgré les nombreuses opérations destinés à la sécher et ventiler le cylindre puis le piston de la machine: Rien!... Donc on part à la rame, (c'est pagaie) pas gai…je ne comprends pas qu'un moteur sur l'eau se noie !....Alors que ….bon, si c’est possible!…Bilan: la bougie ne fonctionne plus…

 

Je n'ai plus d'allumage, en rame j'enrage, je n'ai plus l'âge, mais soyons sage, c'est dommage, de n'être pas au garage…

 

Alors, après le plein de provisions, chargés de victuailles achetées à San José, (charmante ville où j'ai déjà séjourné en vacances, en camping, il y a quelques années), il faut ramer…

 

Rejoignant le bord en repartant difficilement contre le vent et pagayant fortement, c'est fatigant, ça prend du temps, mais en se forçant, en arrivant on sera contents.

 

Et là, vu que je connais la chanson, je me dis !

 


En bas de la dune, là c'est l'ami Pierrot…

Faut que l'moteur s'allume, et aller au bateau…

 

Ma bougie est morte et puis pas qu'un peu…

Y faut que j'me force, pour ramer à deux…

 

 

Dès le lendemain, le vent se lève, se renforce, de lourds nuages s'amoncellent, la tourmente menace vers Cabo de Gata (le cap de la chatte) et ici quand ça souffle: "chat miaule"…Le Navtex du bord signale un BMS pour 24 heures annoncé en mer d’Alboran  qui de trouve sur notre trajet, entre l’Espagne et le Maghreb, c'est désormais la route de l’ouest maintenant.

 

Ca secoue, alors arrivés à la Marina d’Almerimar le 2 octobre,  On décide de rester quelques jours afin de se reposer un peu et laisser passer la météo à de meilleurs sentiments vis-à-vis des embarcations qui voguent sur la méditerranée.

 

 

(Le coup de cafard)

 

C’est le temps d’un petit resto typique au cœur de la cité le soir, la marina n’est pas trop chère, dans les rues, Ghislaine croit voir des dattes par terre, mais avec des pattes !….Et qui bougent: ce ne sont donc incontestablement pas des dattes !…ce sont d'énormes cafards qui gambadent joyeusement dans les artères de la cité…passant d'un trottoir à l'autre sans états d'âme apparents, traversant la rue sans prendre garde, inconscients du danger qui les menace, n'ayant aucune considération particulière pour cet entourage infesté de piétons humains qui grouillent et fourmillent autour de leur petites carapaces désuètes, les risques sont imminents pour ces créatures, le risque de collision est grand et prendre un coup de ses congénères aussi, on connait tous le "coup de cafard" c'est une angoisse permanente dans cet univers à l'environnement périlleux…

 

Il faut profiter de cet arrêt pour effectuer la vidange du moteur et changer les filtres d’huile et de gazole, réviser le moteur de l’annexe et bricoler un peu à bord. Je m'inquiète un peu  car de l'eau, toutefois, en petite quantité stagne dans la cale moteur, on doit éponger de temps en temps.

 

 

Le 5 octobre au soir, à 36 miles de là, la ville de Motril où quelques nombreux cargos de plusieurs milliers de tonnes manœuvrent sans cesse en lents et amples mouvements lourds d'inertie,  il faut se frayer un passage parmi eux en essayant de ne pas les toucher si possible, (c’est pas le moment d’aller en couler un…)

 

Ici, la police locale en uniforme gère le port et effectue les formalités d'entrée des bateaux de toute sorte, il faut s'efforcer d interpréter les papiers d'entrée et sortie de port rédigés en Espagnol, des fois traduits en Anglais, très rarement en Français.

 

A la marina est exposé un grand "pendule de Foucault" Léon de son prénom (1819 – 1868) d'environ 4 mètres de haut, en inox (le pendule, pas Léon) pour prouver la rotation de la terre à ceux qui en doutent, ainsi qu’une reproduction de la statue de la petite sirène dont l’original est basé à Copenhague (Danemark, en haut à droite en partant de la porte de Clignancourt)

 

Départ le 6 octobre, après 50 miles de navigation poussés par un vent de sud-est, près de Marbella pour rejoindre Belnamadena, la plus belle marina d’Europe (dixit les documents bien informés qui sont à bord) et c’est peu être bien vrai vu l’architecture originale des bâtiments rutilants de cette marina, ainsi que la configuration environnementale qui rappelle un peu Venise, beaucoup de magasins et de restaurants animent ces endroits de la cité où abonde une population touristique et hétéroclite, les éclairages de nuits sont somptueux, reflétant dans les édifices une multitude d'éclairages indirects d'un halo aux couleurs diffuses du meilleur effet, ça et là de petits perroquets appelés "inséparables" se nichent dans les palmiers environnants, malheureusement les nombreux commerces de luxe ne laissent que peu de place pour ceux qui n’ont pas les moyens adéquats…

 

C’est ici, dans un établissement  tout neuf qui, selon les conseils avisés des accastilleurs Français vus à Torrevieja, nous trouvons le méthanol dont on a besoin pour notre pile à combustible, ainsi que l’achat d’une bougie neuve pour notre moteur d’annexe,(ce qui pourrais bien nous éviter de pagayer) et même une petite boite de ressorts neufs pour mes winchs. Les magasins d’accastillage (ou shipchandler) sont comme des magasins de jouets pour marins où l’on ne trouve pas toujours ce que l’on veut et souvent des accessoires que l’on ne cherche pas, mais qui pourraient servir, au cas où… L'inutile peut être indispensable sauf si l'on en a pas besoin, mais, ça dépend… (Quoi que !…)

 

 

Estepona

 

Le 8 octobre est un mouillage près du port, mais il est ce que l’on appelle "rouleur" (ce qui vous empêche de dormir la nuit, tant le roulis est important) l'avantage de ne pas pouvoir dormir est de ne pas avoir à se réveiller, donc dès potron-minet le 9 octobre nous partons pour faire les 23 miles qui conduisent à Gibraltar.

 

 …Alors là c’est pluie et brouillard, le froid en plus, en slalomant au milieu de dizaines de cargos indiqués par notre AIS, mais vus souvent qu'une fois pratiquement dessus tellement la visibilité est faible, pour la plupart au mouillage, heureusement, ces monstres d'acier sont très impressionnants dans cette brume et l'on se sent tout petits à leur coté, (c'est la notion de la relativité)

 

 

(Gibraltar)

 

Nous devons remonter dans la baie, on se met au ponton de carburant afin de faire le plein et demander des renseignements pour une place de port, j'avance doucement parmi les autres bateaux au milieu d’un rideau d'eau, c'est "pluie et brouillard"  jusqu’au moment où nous parvient un " Can I help You ?... " Lancé par un employé de la marina et venant de la jetée, il me guide enfin vers un emplacement et sommes accueillis à la capitainerie complètement dégoulinant, trempés de cette pluie mouillée que l’on rencontre au sud du 37ème parallèle, mais ailleurs aussi, quand même…

 

Il ne sera pas dit que l'on repartira d'ici sans avoir visité ce lieu historique, profitons en pour un modeste petit resto puis un petit tour en ville pour voir les fortifications, le tunnel creusé par les Britanniques, les canons exposés et aussi monter sur le fameux rocher où résident des dizaines de singes en liberté qui y habitent (ne pas approcher les trop près, ça peut mordre…) de là-haut on peut admirer l’ensemble de la baie et au-delà vers le Maroc.

 

On approche maintenant de la sortie de la  Méditerranée avec une escale à Tarifa le 11 octobre, à la pointe extrême sud de l’Espagne, c’est encore un mouillage bien secoué d’où l’on repart dès le petit matin du 12 octobre pour le  détroit aux heures qui vont bien, quand la marée est favorable pour la sortie sur l’océan, c’est un bouillonnement inquiétant et spectaculaire formé par les courants entre l'océan et la Méditerranée qui accompagne notre sortie vers l’Atlantique.

 

Le 12 octobre, est le jour où l’on célèbre Christophe Colomb en Espagne, la majorité des commerces sont fermés durant cette période alors que ça fait déjà longtemps que Christophe est revenu des "Indes" de là-bas…

 

Pendant la navigation un petit oiseau genre «piaf de base» vient trouver refuge à bord, sur le pont, puis dans le carré pour se reposer et une heure après, dans un décollage impeccable, repart d'un tire-d'aile en lançant deux "cui-cui" significatifs….Apparemment reposé et en pleine forme. 

 

La décision est prise de remonter un peu plus au nord pour s’arrêter à la marina de "Barbate" avant de passer au large du détroit pour le traverser nord-sud de jour et longer le Maroc au large ensuite.

 

Là, nous en profiterons pour faire la lessive de quelques affaires à la laverie du port, s’occuper du plein d’eau, compléter l'avitaillement en boites de conserves, plus un peu de produits frais et divers ingrédients destinés aux repas qui composeront notre consommation journalière en liquides, protéines, glucides, lipides et autres, et pour se préparer à affronter les plusieurs jours de mer qui nous attendent d'ici les Canaries.

 

 

 (Le coup de Trafalgar)

 

Barbate

 

C’est à 5 miles du cap de Trafalgar, là, où le 21 octobre 1805, 74 vaisseaux engagés dans la bataille par l’intermédiaire de la flotte royale d’Angleterre contre la nôtre (avec celle des Espagnols qui étaient nos alliés à l'époque), se sont "disputés grave" avant qu'on arrive….

 

La flotte Française envoyé par Napoléon Bonaparte, commandée par l'Amiral Pierre Charles de Villeneuve à bord du "Bucentaure", accompagnée des autres vaisseaux Français et de ses alliés, contre la "Royale Navy" commandée par l'amiral Horacio Nelson à bord du  (Her Majesty's Ship) " HMS Victory" (qui y trouva la mort par les canons du navire Français le "Redoutable" du capitaine Lucas) et assisté de l'amiral Collingwood à bord du" Royal Sovereign" pour l'Angleterre et les autres navires de guerre Britanniques.

 

Selon ses souhaits, à sa mort, l'amiral Nelson fut embaumé dans un tonneau de rhum, certains marins n'auraient pas résisté à la tentation d'y goûter et il serait d'usage en Grande Bretagne de boire un "Admiral Blood". (Se taper l'amiral) à l'apéro…

 

Bilan des opérations: Français et Espagnols; perte de 23 navires, 4400 marins tuée ou noyés, 2500 blessés, plus de 7000 prisonniers et pour les Britanniques; 448 morts et beaucoup de bateaux endommagés.

 

Mais bon, tout ça c’est fini et maintenant il n’y a plus personne de concerné là bas, en tout cas, nous, on en a pas vu !…

 

 

 

*      5) L’Atlantique

 

(Le sud)

 

Jeudi 14 octobre à 12 h30 nous quittons l’Espagne pour traverser le détroit de Gibraltar en direction du sud

(Aucun navire ennemi en vue….) les Canaries sont devant l’étrave…. C'est le grand moment d'une première navigation de plusieurs jours au large des côtes Africaines.

 

Vendredi 15 octobre, la plaie furtive de l'Atlantique, fendu par l'étrave se referme aussitôt derrière nous dans un gémissement de fugaces "glouglous" discrets, ponctués d'infinis petits tourbillons ridicules qui s'enfuient pour aller mourir, étalés par l'énorme inertie liquide de l'océan, en les écrasants d'une vague indifférente à ceux qui, quelques moments plus tôt n'existaient de doute façon même pas. (La fragilité existentielle des éléments et des particules fondamentales prend ici toute sa dimension, On est peut de chose, tout de même…)

 

Puis, manque de vent pendant trois jours et une moyenne de vitesse aussi difficile à tenir qu'une promesse politique au lendemain d'une période électorale, on se traîne lamentablement à 1 ou 2 nœuds et à ce rythme nous ne sommes pas arrivés…Eole, est en week-end. Nous passons notre journée en short dans la chaleur à se demander s'il faut entamer la danse du vent…

 

Alors décision est prise: le moteur du bord dois participer à la propulsion du bateau, qui sinon, patauge et clapote, comme un petit canard en plastique jaune seul dans une baignoire pleine d'eau qui se balance mollement sans but précis au gré des ondulations de l'onde qui gère ses possibilités de déplacement dans son environnement direct, situation divertissante s'il en est, qui n'en est pas moins ludique, mais n'exclue toutefois pas la difficulté de maitrise d'un cap à suivre qui reste aléatoire sur la direction choisie alors qu'aucune influence à part un courant d'air ne peut intervenir, même en changeant les paramètres de la couleur du canard.

 

17 octobre, péché par Ghislaine, un poisson dont on ne connait pas la marque, mais plutôt du genre maquereau ou bonite, à l’avenir improbable désormais et dont le processus vital est maintenant engagé à brève échéance, sera notre dîner, La traçabilité estampillée: "Provenance océan Atlantique garantie " est réelle et incontestable, même si c'est pas marqué dessus.

 

18 octobre, cette fois le temps change, les nuages arrivent, grossissent et le ciel devient gris, le vent monte à force 6 nord-nord-est, le soleil à disparu, depuis et il fait frais et l'océan devient houleux. Ca bouge beaucoup tant en roulis qu'en tangage, c'est pas le moment de jouer au Mikado…

 

 

(Piou-Piou)

 

De nouveau la visite d’un petit oiseau fatigué, il rentrera dans le carré pendant plusieurs jours, nous l’avons nourri, abreuvé, chauffé, câliné, je l’ai appelé « Piou-piou. »(Il n’en à pas eu l’air surpris….Comme quoi ça doit être un nom courant chez eux…)

 

Il se laisse attraper et caresser, me mange dans la main,  je lui trouve une petite boite qui sera son nid pendant la période où nous lui offrons l'hospitalité bénévolement en attendant son décollage de ré-envolement…

 

Malheureusement trois jours plus tard, il mourra à bord avant d’avoir pu récupérer malgré nos soins…

 

Raison du décès inconnue. Pas d'autopsie pratiquée, dernier domicile connu avant son arrivée sur "Erreip": le ciel, aucune trace de la famille, son âme retournera au cieux quant au corps: l’inhumation aura lieu en mer par 32°10’ Nord et 10°54’ Ouest en présence des membres d’équipage dans un silence religieux et un recueillement solennel qui inspire le respect dédié  à la mémoire des petits oiseaux défunts perdus en mer pour la période comprise depuis leur apparition sur terre et au ciel jusqu'à nos jours.

 

Notre veille de nuit est alternée par tranches de trois heures chacun, je demande à Ghislaine de me réveiller à chaque incident anormal et c’est se qui se passe cette nuit là au large du Maroc, alors que nous nous dirigeons vers une multitude de lumières clignotantes vertes et rouges, je suppose que ce doit être des casiers ou des filets de pêche occupant une superficie très étendue,  il faut passer bien plus au large que prévu pour les éviter.

 

Au 19 octobre, c’est un temps calme et sans vent qui revient, on met à contribution le moteur à explosion de 1.115 cm3 de cylindrée, Alimenté au pétrole brut raffiné à chaud et transformé en gazole liquide par une tour de séparation de ses molécules élémentaires, qui après acquisition d'un nombre de litres suffisants, soumis au prix du marché, régulé par des fluctuations variables et des aléas circonstanciés de la géopolitique mondiale globale, sont ensuite injectés sous pression adéquate dans la mécanique de motorisation du bord activement coordonnée et qui  permet de transformer via un ingénieux système organisé et complexe à donner suffisamment de motricité avec l'intermédiaire d'une transmission finalisée par un mouvement hélicoïdal, faisant tournicoter joyeusement une hélice tripale qui propulse le bateau en un déplacement linéaire quasi continu dans l'eau salée dont l'illustration sonore se traduit par un ronron lancinant autant que régulier à 1800 tours minutes, rythmant le trajet monotone au gré du temps qui passe mollement dans la torpeur d’une chaude journée de fin d’automne, ceci n’étant pas sans rappeler sans doute la dernière fois où c’était pareil, mais pas le même jour…Ne nous y trompons pas !....

 

 

(No smoking)

 

Le lendemain, encore pendant la veille de nuit, Ghislaine me  réveille à cause d’une petite embarcation munie d'un puissant moteur et équipée d’un projecteur qui braque sa lumière aveuglante dans nos yeux qui sans être ébahis n'en demeurent pas moins étonnés. Ils nous foncent dessus et font route parallèle à juste à coté de notre bateau,

 

Je reste sur mes gardes ne sachant si on a affaire à des pirates mal intentionnés, par définition, où à des margoulins aquatiques déroutants, par nature sortis des ténèbres de cet univers liquide nocturne. Je me prépare à toute éventualité, ils s'approchent au plus près du bordé, j'attends de savoir de quoi il retourne…. Enfin, ils nous parlent, et nous proposent en anglais et en français des cigarettes, ce sont apparemment des pécheurs qui trafiquent un peu, certainement voir plus si affinités.

 

On leur dit que nous ne fumons pas (restons simples, No smoking!)

 

Et finalement après un temps d'observation, ils repartent en nous souhaitant "bienvenue à Essaouira", bien que nous en soyons à plus de 200 miles nautiques. Bizarre….

 

Fin de l'intermède,  je retourne dormir en attendant mon prochain quart. Ca va être un peu plus difficile maintenant…

 

 

*      6) Les Canaries

 

La Graciosa

 

Les Canaries (Canaria), dont le nom provient du latin " Canis " à cause de gros chiens sauvages errants trouvés sur l’île de Gran Canaria à l’époque des Romains, se composent de sept îles volcaniques principales très différentes les unes des autres, au large des côtes Africaines.

 

Ici, Changement d’heure, il faut en retirer une de plus (en moins) à ma montre…

 

Nous arrivons enfin à la première île de l'archipel, la Graciosa le 21 octobre à 11 heures, après 575 miles effectués en 7 jours environ sans voir la terre, on s’engage vers le port de l’île afin de faire le plein de gazole et demander une place de ponton au port, personne à la station de carburant, je pars chercher quelqu’un, mais ça doit être la sieste,  il faudra attendre plusieurs heures avant de voir un employé préposé au carburant où cette fois un bateau de pêche et un bâtiment des autorités militaires Espagnoles font pareillement la queue avec nous, Finalement les militaires, qui sont arrivés plus tard, nous laissent passer pour être servis et l'on va chercher une place, mais d’un ponton, un garde nous interpelle et demande les papiers prouvant que les formalités d’entrée, uniquement demandées débarquer sur cette île, on été faites à Arrecife sur l’île de Lanzarote  qui se situe à plusieurs heures au sud de la Graciosa.

 

Evidement ne les ayant pas encore faites puisse qu'on vient d’arriver du nord, après plusieurs jours de mer, il ne veut pas nous laisser prendre une place et débarquer, du coup on sort du port et allons mouiller juste en face pour la nuit.

 

 

Lanzarote

 

Dès le lendemain matin nous voilà partis pour Lanzarote, on va se renseigner pour faire les formalités à Arrecife, mais là encore les bureaux sont loin de tout appontage, fermés, on se renseigne mais personne n’en connaît les heures d’ouvertures, alors on descend plus au sud pour accoster le 22 octobre à la marina de Puerto Calero dont les bittes d’amarrage sont en or dit on, (certainement pas, car on aurait alors peut être  surpris des chasseurs(eusses) de bittes pour le profit, assurément…)  Mais ça y ressemble drôlement pour la couleur (celle de l’or, bien sûr…), je crois plutôt que ce sont des bittes en laiton polies ou de la bitte de bronze (ce qui n'est pas mal non plus et qui se respecte).

 

Là, on trouve une ambiance bien plus sympa et nous louons un véhicule (une Opel Corsa) pour visiter

Lanzarote, Cette île presque désertique d'un gris minéral, soumise aux vents où les volcans ont fait leur œuvres et qui à cause du manque de pluie est restée un peu comme un tas de pierres brulées, genre pouzzolane, les routes en très bon état (financées par l’union Européenne) semblent posées sur ce terrain désolé à la façon d’un tapis déroulé, c’est du plus bel effet et un peu irréel, mais malgré qu'on ait du mal à y croire, on roule dessus quand même (tapis pour lui…)

 

De là, au nord, sur une colline nous pouvons revoir la Graciosa qui est magnifique, on dirait un désert de sable, mais tant pis, on ne va pas passer notre temps à attendre qu’un hypothétique bureau ouvre à Arrecife pour remonter faire les papiers et 20 miles nautique plus au nord en 4 à 5 heures de navigation afin de rentrer visiter la fameuse Graciosa qui est désertique et très petite.

 

 

(Séquence culturelle)  

 

Avec la visite d'un petit musée relatant l’histoire des habitants, de ses costumes, ses coutumes sa culture et ses cultures agricoles des époques passées.

Nous nous attarderons, afin de voir les salines et "El Golfo Verde", un lac de teinte vert fluo dû à la présence d'algues et de minéraux qui donnent à ses eaux cet aspect coloré.

Visite également d'une unité de production d’Aloé Vera dont les bienfaits pour la peau, voir plus, ne sont plus à démontrer et qui exporte dans le monde entier et aux alentours…

 

 

(Diableries)

 

Je brûle de connaître cet endroit, nous assistons aux effets du volcanisme, près d'un restaurant qui propose des cuissons au barbecue chauffés au dessus d'un trou béant d'où sort directement la chaleur dégagée par le volcan.

Là, nous assistons à une scène étrange, si on approche près d'une cavité creusée au sol, des branchages de buissons ou d'arbres, ils s'enflamment spontanément sous l'effet de la chaleur dégagée par terre.

 

A coté, au beau milieu de badauds dont nous faisons partie, le spectacle est impressionnant: un préposé près d’une ouverture d'un diamètre d'environ 15 centimètres située par terre, verse la quantité d'un verre d'eau à l'intérieur, puis se recule et 5 secondes après c’est un geyser de vapeur brûlante qui en jaillit brusquement jusqu'à plusieurs mètres de hauteur….

 

Nous sommes certainement invités à de la pub pour le diable, C'est le "Lucifer des enfers" aux sortilèges et rites sataniques en tout genre, ou du "Belzébuth brut de brut" et ses acolytes spécialisés en maléfices, sans aucun doute en rapport direct avec l’enfer du démon, nous avons eus la tentation pour voir ça et c'est ensorcelant, mais" bon Dieu, ça fait peur" !…

 

Tout près de là, nous empruntons un circuit routier sur une route goudronnée et en sens unique, seulement autorisée à un autocar qui fait la ballade aux touristes durant une demi heure pour voir ce terrain vallonné, dévasté, sans arbres ni végétation, rocailleux et parsemé d'éboulis, transformé par les éruptions de l’époque où rien n’a repoussé depuis par manque de pluie,

 

Tendant à prouver qu'ici existe une civilisation, aux environs quelques cultures consistent à faire pousser des pieds de vigne dans des cailloux gris et noirs au ras du sol et protégées du vent par un demi cercle de pierres en forme de fer à cheval qui sert également à retenir le peu d’humidité qui se trouve là.

 

Au port, on affrète la grue de la marina pour sortir le bateau de l’eau afin de faire un nettoyage de la coque au Karcher. Nous rencontrerons mon ami Alain (avec qui j’étais parti en Corse auparavant) qui, parti sur un autre bateau avec un équipage de 5 ou 6 personnes font également un arrêt dans cette marina avant une transat, mais lui doit revenir en métropole dans la foulée par avion ensuite.

 

Nous restons jusqu’au 27 octobre pour aller ensuite à Rosario qui se trouve sur l’île plus au sud de Fuerte ventura, qui signifie "Forte aventure", c'est ce qu'aurait dit celui qui l'a découverte, le chevalier Normand Jean de Béthencourt alors au service du roi d’Espagne en 1402.

Nous mouillons près d’une barge et le lendemain repartons pour 50 miles au sud de cette île, vers Morro Jable, un mouillage pas vraiment tranquille car un voilier sous pavillon Allemand se trouve trop proche de nous dans la nuit et vers 3 heures du matin,  pour ne pas risquer la collision nous devons trouver un endroit plus sécurisé pour finir la nuit tranquille jusqu’au lendemain matin.

 

 

Gran Canaria

 

Le 29 octobre, c'est à l’île de "Gran Canaria", à Las Palmas après un parcours de 56 miles en 13 heures de navigation par force 5 de nord-ouest, que l'on s'amarre pour quelques jours à la marina où beaucoup de voiliers préparent la transat depuis cette base, quelques demandes d'embarquement sont formulées surtout par des jeunes qui font du "bateau-stop" pour aller aux Caraïbes, des demandes verbales de bateau-stoppeurs draguent sur les pontons de la marina et des petites annonces fleurissent un peu partout dans ce sens. De vieux "loups de mer" échoués ici et là dans les bistrots alentours, eux évoquent leurs histoires de mer réelles ou inventées…

 

Nous nous apercevons que l’eau qui suintait dans la cale moteur venait en réalité de la douchette du cockpit qui fuyait (celle qui sert à se rincer après un bain en mer) et l'eau douce coulait le long du tuyau pour arriver jusque dans la cale du moteur, tel le plombier moyen, je répare….Et de suite le problème est résolu!…Enfin!...

 

On trouve à louer une Fiat Punto pour visiter le sud de "Gran Canaria".

 

À Maspalomas, charmant endroit de plages sablonneuses surpeuplées et grouillantes de touristes cosmopolites et bruyants (Allemands en majorité). Là, restaurants, self-services, bars, tavernes à profusion, magasins de souvenirs, vente de bouées en plastique, cartes postales, tongs, joujoux et ballons dans toutes les boutiques…. Incitent à aller voir plus loin…

 

A quelques kilomètres de là, la petite ville fleurie de Mojan est très sympa, un vrai bouquet avec des petits canaux et des ruelles où il fait bon flâner par cette journée ensoleillée.

 

Un sous-marin jaune d’une trentaine de places loué pour les estivants afin de faire un tour d'une demi-heure dans les fonds marin du coin nous a baladés sous l'eau où nous avons pu admirer les dessous de la mer.

 

On passe devant une maison où à séjourné Christophe Colomb en transit avant son départ pour les Amériques où il atterrit en 1492 soit 519 ans avant nous…Etonnant, non ?...

 

 

Tenerife

 

(Ferry)

 

Le 2 novembre, visite sur l’île de Tenerife, cette fois via le ferry qui fait la navette de Las Palmas (où nous avons laissés le bateau) à Santa Cruz de Tenerife, nous dormons dans une chambre d’hôtel de Santa Cruz dont la ville nous a conquis par son charme, là nous louons une Opel Astra, pour aller voir le volcan le plus connu de l'archipel, éteint pour l'instant, le fameux "Pic de Teide" culminant à 3700 mètres, le plus haut point les Canaries, site impressionnant et majestueux, de son sommet il domine la plupart des îles environnantes de son imposante présence mégalithique.

 

D'autres montagnes semblent tutoyer le ciel de l'île, non loin de là, ce sont d'immenses excroissances rocheuses, disposées fièrement dans ce monde relativement chaotique de volcans endormis dont on ne connaît ni leur phase de sommeil, ce qui peut être paradoxal,  ni l'heure de leur  réveil qui peut être difficile, où du calme profond peut brusquement survenir un déchainement diabolique, dévastateur et effroyable tout droit sorti des entrailles de la terre, brûlant tout sur son passage, ne laissant que cendres et désolation.

 

Puis nous pouvons admirer sur plusieurs kilomètres carrés, les immenses bananeraies dont les fruits, tous verts, abrités sous de larges feuilles, donnent en toute logique à plein régimes. (De bananes)

 

Quelques anciens moulins à grains d’une époque lointaine et révolue, qui sont encore en place ça et là, témoignant du passé, ils servaient à broyer le "Gofio", des céréales: blé, orge et avoine qui constituaient les aliments de base des plats principaux d’alors.

 

D’immenses étendues constituées de roches et de sable font penser à un désert lunaire dont seule la bande d’asphalte de la route peut nous en détromper.

 

Ensuite nous allons rendre notre voiture de location, le réservoir presque vide car nous n'avons pas trouvé de stations service, l'ordinateur de bord n'a pas l'air content et le voyant lumineux du tableau de bord nous fait le l'œil depuis un bon moment, manque de chance les nombreuses déviations causés par travaux sur le port nous posent beaucoup de problèmes pour retrouver l’entrée de l’agence de location, c’est finalement dans un parking à 5 minutes à pied que nous la laissons avec 1 ou 2 kms de réserve de carburant et de là, allons voir les responsables de l’agence pour leur expliquer la situation, malgré le problème de langage, pas de soucis il ont tout compris, il iront la chercher plus tard là-bas, pas d’angoisse quand il faut ramener les autos de location, ils ne vérifient rien, ni la carrosserie, ni s’il reste de l’essence, il n’y a même pas de caution, cool!...Et nous rentrons juste à temps pour reprendre le ferry de Santa Cruz de Tenerife vers Las Palmas et retrouver notre bateau.

 

 

Le 4 novembre, nous quittons Las Palmas dans une mer extrêmement agitée où nous sommes secoués dans tous les sens, au point que l’on s’est posés la question de faire demi-tour, mais bon, on a tenu et après  une navigation de 80 miles en 25 heures, c’est à Los Cristianos au sud de Ténerife dans un mouillage agité avec un bon force 6 que nous avons plantés la pioche, comme on dit, (secoués toute la nuit comme des boules de loto de la "Française des jeux" avant le tirage du gros lot, on n’a pas trop dormi…et on y a rien gagné…)

 

 

La Gomera

 

Et le lendemain …Direction l’île de la Gomera, située à une vingtaine de miles au sud-ouest et 5 heures de navigation, pour la marina de San Sébastien de la Gomera.

 

On nous donne une place à coté du voilier d’un couple Belge parti pour les Antilles avec leur fils, dont nous avions souvent consulté leur blog sur Internet, on va les saluer et discutons un peu, puis faisons connaissance avec un autre couple, parti avec ses  deux enfants qui suivent les cours du CNED,  ils ont tout laissé tomber en France pour faire le tour du monde.

 

 

(Rencontres apéritives)

 

Nous sympathisons, apéro, bien sûr, où l'on trinque à "l'intelligence" ( la santé on l'a déjà !…) avec des échanges de points de vues divers et variés, discutions existentielles généralisées sur les motivations profondes en eau claire de la génération contemporaine présente et les conséquences sous jacentes pour les siècles à venir sur d'éventuelles répercussions  pouvant être répétitives dans un avenir relativement proche bien que ce ne soit pas prouvé et qui sans être incertain devraient inévitablement, sans aucun doute se produire dans des circonstances préalablement imprévues et dominées par la conjoncture événementielle, quoi que on ne sait jamais….Bref! Un super apéro.

 

On va se retrouver avec tous ces gens aux Antilles plus tard autour d'un "Ti punch"…

Ce n'est qu'un au revoir !…

 

C'est parti pour louer une voiture, une Opel Corsa (il y en à beaucoup chez les loueurs aux Canaries).  Direction, la vallée de "Grand Rey" sur la côte nord de cette île magnifique où des vallées grandioses et encaissées, couvertes de nombreuses variétés de plantes grasses survivent sur cette terre aride et rivalisent de beauté en se partageant l’espace avec des fleurs exotiques des toutes les couleurs.

 

De gigantesques rochers parsèment l’île et nous visitons une immense forêt primaire située en secteur protégé refermant des centaines d’arbres et de plantes inconnus de nous, beaucoup de plantations en espaliers sont présentes également un peu partout aux Canaries, des avocatiers, bananeraies, fleurs tropicales en tous genres, tels que des "oiseaux du paradis",  hibiscus, ainsi que certaines espèces connues de nous uniquement chez les fleuristes équipés convenablement, qui les vendent très cher quand on veut les acheter pour offrir aux moments où on est invités chez quelqu’un….

 

A la marina il y a une petite annonce concernant la vente de pavillons de courtoisie (pour arborer dans la mâture du bateau lors de la visite dans les eaux territoriales de pays étrangers) et des cartes papier des Antilles, alors ça nous intéresse, vu le prix et contactons le vendeur, c’est un Anglais marié à une Hollandaise, leur bateau se nomme" Dutch Link" (un OVNI de chez Alubat en aluminium)  on se voit et lui achetons presque tout son stock de pavillons des Antilles ainsi que plusieurs cartes pour les Caraïbes, dont ils ont déjà sillonnés l’ensemble dans leur globalité durant plusieurs années, des gens sympas qui repartent désormais naviguer en Europe.

 

 

La Palma

 

Le 13 novembre, l’île de la Palma à environ 50 miles plus au nord-est, après presque 10 heures de navigation sur une mer agité et une houle de 2 mètres dans un vent de nord-est force 3/4.

 

(Maintenance)

 

Je profite de notre passage en marina pour vérifier certains points, vidanger le moteur et changer les filtres avant notre prochain départ, sur un bateau la maintenance est primordiale tant les événements problématiques peuvent s’enchaîner les uns après les autres, s’additionnent puis se multiplient (en moins de temps qu'un banquier n'en met pour compter des agios à débiter sur un compte courant à différentiel négatif récidiviste)

 

C'est la fameuse loi de 'Murphy" énoncée en 1948 par un ingénieur américain (Edward Murphy) spécialisé dans l'aérospatiale, qui stipule que si quelque chose peut "mal se passer", alors ça arrivera forcément.

Ou la "L.E.M." (Loi de l'Emmerdement Maximal) d'origine militaire, qui signifie qu'en cas de défaut dans le plan de bataille, l'ennemi l'exploitera forcément.

Ou alors la loi de la "tartine beurrée" qui dit qu'elle tombe toujours du coté du beurre si on l'échappe. (Si elle tombe de l'autre coté c'est qu'on s'est trompé de coté pour mettre le beurre)….

 

 

(Séquence découverte)

 

Cette fois on loue encore une voiture, pas cher heureusement, car c’est un boulet, dans les montées ça n’avance pas (je ne citerais pas la marque car je n’ai aucune autre raison de critiquer la " Matiz de chez Chevrolet "), mais bon…Avec, on visite tout de même le nord de la Palma constitué de montagnes hérissées aux pointes acérées visant le ciel dont le bleu azur se teinte parfois, certains matins d’un voile brumeux de basse altitude recouvrant au loin le "pic de Teide", seul son sommet émerge tel un chapeau chinois pointu de la masse informe de nuages vaporeux aux contours incertains, d'où un halo flou se dilue doucement dans l’avancée des chaudes heures s’approchant en cette fin de matinée qui s'annonce ensoleillée.

 

Il existe des sentiers aux roches couvertes de pétroglyphes datant du temps des hommes des cavernes, ils sont gravés dans la pierre pour des siècles, laissant entrevoir des messages témoignant de leur lointaine époque et semblant nous être destinés.

 

En dehors du tourisme l'île possède de grandes plantations de bananes, cultures maraîchères en espalier, immenses vergers de fruits et de nombreuses vignes.

 

A Santa Cruz de la Palma, beaucoup de balcons proéminents, façonnés et pour la plupart sculptés de belle facture, en bois précieux, le plus souvent parés de plantes exotiques et de fleurs multicolores s’invitent à la vue des passants étonnés que nous sommes par cette exposition permanente.

 

Une reproduction grandeur nature de la caravelle " Santa Maria " est exposée en ville en mémoire à Christophe Colomb, sans doute pour se souvenir de la différence des navires qui naviguaient à l’époque dont les instruments se résumaient en une simple boussole, une longue vue et l’astrobale pour faire le point, mais point de traceur de cartes couleurs multifonctions 1024 x 768 pixels en 14 pouces, normes IP 67 avec radar intégré et sondeur graphique, pas mieux de pilote automatique avec correction de trajectoire en fonction des waypoints incorporés, non plus de GPS transmetteur de la position géodésique en temps réel des coordonnées géographiques, ni de boite de conserve alimentaire basique longue durée à ouverture rapide grâce à la languette incorporée qui fut inventée bien plus tard (mais c’est là, c’est pas sûr….)

 

Plusieurs dizaines de télescopes géants, rutilants, automatisés et modernes, d’un blanc immaculé de conception …que j’ignore, sont installés dans l’île, ils profitent du climat et de la luminosité exceptionnelle du site, gérés par la communauté Européenne, posés en altitude sur une immense zone rocheuse dégarnie de végétation, mais agrémentée de pics abruptes, ils scrutent le ciel à la recherche d’étoiles et planètes connues et inconnues afin d’espérer comprendre au mieux notre environnement astronomique,  intergalactique et cosmologique de la banlieue de cette planète terre, qui comporte 70% d’eau et sur laquelle y’en a qui font du bateau….

 

Univers sidérant dans lequel on est que dalle, ou univers sidéral dans lequel on est dedans…

 

Au port nous voyons " Dutch Link " amarré, (le bateau des Anglo-hollandais que nous avions rencontré à la Gomera),  nous les saluons et les invitons à l’apéro,  puis nous sommes invités chez eux à bord de leur bateau, pour le dîner, ils nous donnent à télécharger un programme de navigation qui permet de créer des routes maritimes et d’avoir instantanément les distances pour les navigations que l’on prévoit, génial…

 

 

El Hierro

 

La dernière destination des Canaries nous attend avec L’île de "El Hierro" au petit port de la Restinga à 70 miles et 12 heures de navigation plus au sud d’ici.

 

Dernière terre connu la plus à l'ouest du temps de l’antiquité par Pline l’ancien,  cette île a été le "Méridien 0" avant Paris puis Greenwich, port le plus au sud des Canaries,  il n’y a plus d’escale avant le Cap Vert.

 

C’est en allant à la capitale "Valverde" située au nord de l'île où nous nous rendons en car qui fait la navette plusieurs fois pas jour, que nous louons une Volkswagen  Polo, pour visiter les quelques restes des villages " Guanches " dont les sites sont protégés pour rester témoins de l’histoire. Ils étaient le peuple originel de l’archipel qui vivait ici et ont étés exterminés par les Espagnols.

 

 

(Les points cardinaux)

 

"El Hierro", est une île superbe et très différente du nord au sud, de l’est à l’ouest, ainsi qu’au milieu …

 

A l'est

 

Ici, les vents ont façonnés au cours des années les arbres et la végétation sauvage en lui donnant sa forme tarabiscotée, croissant et grandissant en toute liberté, dont les diverses évolutions de formes n'obéissent qu'à leur propres lois finement éclairées suivant des objectifs de progression éloignées de toute contrainte pouvant être soumises au mimétisme potentiel de leur milieu environnant immédiat.

 

Au nord

 

Il y pleut souvent, dans un petit restaurant on s’essaye au plats régionaux (les fameux "mets locaux" et non pas "melocos" qui eux sont devenus une blague mortelle…) C’est ainsi que je me retrouve avec un brouet, où je soupçonne et suspecte, mais tout de même sans supputer (quoique…), contenir de la mie de pain, des morceaux d’œufs d'une volaille inconnue cuits au hasard en vrac et quelques haricots fripés qui baignent avec des objets flottants au sujet desquels je suis loin de déterminer l’identité et à fortiori la provenance, le tout dans un bouillon incertain à la douteuse et improbable traçabilité, ce dont je saurais me souvenir pour essayer autre chose la prochaine fois, si toutefois cela devait se reproduire par oubli de ma part au cours d'une redoutable absence de mémoire.

 

A l'ouest

 

Une vaste baie provenant d'un colossal effondrement de terrain d'origine volcanique datant de la disparition de l'Atlantide d'après le récit d'Homère, aurait produit l'effet d'un gigantesque tsunami à l'époque sur une très vaste région et ses environs qui furent dévastés dans des proportions encore inimaginables.

 

 

Au milieu

 

Une immense pinède formée de nombreux résineux rivalisant de beauté, dont les formes élancées enchantent la forêt, fascinant les promeneurs que nous sommes, révélant leurs éclats verdoyants déployés sur toute leur étendue depuis le bas jusqu'au sommet de leurs longues et majestueuses branches piquetées d'innombrables épines qui s'agitent lentement en de larges gestes, dans une aisance de mouvements gracieux et nonchalants, maintes fois renouvelés dans l'indifférence apparemment passive de leur entourage naturel immédiat parmi les herbes et les plantes environnantes de toute nature.

 

 

Au sud

 

Les traces de lave issues de ces volcans sont encore très présentes et consistent en une multitude de petits tas solidifiés ressemblants à s’y méprendre à des bouses de vache séchées, dont seules, les couleurs et la consistance peuvent détromper sans même assurément avoir à y goûter pour en certifier  l’origine et la provenance, bien qu'il n’y est guère de vaches dans la région… les déductions ne sont donc pas trop difficiles,  on peut alors en conclure que c’est bien certainement dû à une résurgence volcanique d’antan que l’on peut attribuer ces formes pâteuses, coagulées, figées, durcies par le temps et épaissit des siècles passés.

 

Ici, Au petit port de la Restinga, il faut faire le plein de carburant et d’eau avec des jerricans à la station du port, nous achetons 2 bidons afin de pourvoir pallier à cette corvée régulière mais nécessaire, consécutive au confort relativement spartiate de ces lieux isolés dont certains qualifieraient aisément de " perdu ". Oui… mais par rapport à quoi peut on être dans cette situation?….on est forcément "perdu" par rapport à un endroit distinct, à quelque chose où à quelqu’un et reconnu comme étant une référence objective dont on en est l'ardent dépositaire… Mais je m’égare… (Oui, mais par rapport à quoi ?….)

 

 

Nous sympathisons avec nos voisins de ponton, quatre jeunes sur un voilier pas plus grand que le notre mais plus ancien (dont le skipper et son bateau sont actuellement arrivés en Polynésie…) L’ambiance est des  plus sympa et nous faisons connaissance avec plusieurs autres équipages d'autres bateaux présents, des Allemands, des Franco-Hollandais et des Français partis faire fortune en République Dominicaine (où ils sont en ce moment), l'ambiance est sympathique, nous formons une petite communauté, celle des gens qui vont bientôt traverser et se confronter à l'immensité de l'océan dans la solitude à bord de leur navire, pour la plupart une première fois pour cette transat en direction des Antilles, du Brésil ou d'ailleurs.

 

 

(Le coup de tabac du coin…Le port de l'angoisse.)

 

Une terrible tempête est annoncée, le vent monte, monte et s'amplifie encore le 29 novembre, la "Guardia Civil" en uniforme réglementaire vient sur les pontons du port, demandant à tous les équipages des navires présents de les abandonner et se réfugier dans les hôtels environnants, tout le monde refuse et nous restons tous à bord de nos bateaux, on renforce l’amarrage et l’arrivée de la tempête ne se fait guère attendre, dans la nuit les 50 nœuds sont largement dépassés, la mer est blanche, on dirait qu'elle fume, des trainées d'écumes bientôt nous entourent, dans le port autour des bateaux, les gréements gémissent, nous sommes ballotés dans tous les sens, des bateaux en face de nous, dans une danse effrénée menacent d'arracher leur amarres et vouloir sauter par-dessus les pontons pour venir nous écraser, il est bien sûr impossible de dormir dans ces conditions dantesques, deux de nos pares-battages crèvent et des amarres cassent, ils faut se lever en pleine nuit pour renforcer encore tout ce qui peut l’être sous peine de se trouver jetés et broyés dans les fortifications en pierre du fond du port dans d' effroyables tourbillons liquide, nous multiplions les cordages et surveillons jusqu’au matin les signes de faiblesse de tous les équipements: pareil pour tout le monde ici …Jusqu'au lendemain où le bilan est lourd pour certains, l'on apprends que cette nuit c’est l’équivalent d’une année de pluie  qui s’est abattue sur la Restinga, une coulée de boue a dévalé des hauteurs environnantes dévastant plusieurs bâtiments de la ville,  heureusement la digue avait été renforcé et malgré que les travaux n’étaient pas terminés cela a pu protéger le port en partie.

Enfin la météo se calme et chacun effectue les travaux inhérents aux assauts subits durant ces moments d'intenses déchainements furieux des éléments survenus pendant cette période dévastatrice terrible.

 

On apprendra qu’un an après notre passage, des volcans sous-marins proches du port se sont réveillés et la ville a été évacuée et elle l’est peut être encore. A part ça c’est un petit port bien tranquille…

 

Nous sommes les premiers à appareiller pour le Cap Vert et notre départ est salué par les équipages du port qui nous prennent en photo en nous souhaitant une bonne navigation pour notre objectif, en avant pour "Cabo Verde", la mer est très agitée par une houle résultante du coup de la tempête précédente, elle dure 2 jours, puis le vent tombe peu à peu, il vire ouest et se meurt doucement, le faseyement des voiles en atteste, il faut en appeler à la mécanique thermique élaboré en 1892 par Mr Rudolf Diesel (entre la période où il n'était déjà plus un bébé et avant son agonie fatale), le son de la mélodie en 3 cylindres, 4 temps sur un air de gazole surtaxé résonne maintenant à bord sur cette partie de l’Atlantique nord en direction du Cap Vert.

 

 

*      7) En route vers le Cap Vert

 

 

(Parfum d'Afrique)

 

Les nuits sont douces durant nos quart de veille, on ne voie pas la côte car notre route en est éloignée de plus de 200 miles nautiques, mais  je sent « l’Afrique » bizarrement, une odeur parfumée, venue je suppose de la terre pourtant lointaine, quelque chose de tenace, d'épicé, qui semble être constitué de féculents, sucrés, salés en même temps, effluves indéfinissables qui semblent venir d'antan, je fais le compte des choses oubliées ou  passées, déjà vécues, mais dont une trace mémorielle résisterait encore dans les tréfonds de mon cerveau , voir même dans la case "reptilienne" sous jacente et je me réfère à ce que j'aurais pu vivre dans le passé qui me rappellerait ce souvenir, mais finalement: zéro, J’ai pas trouvé…( pas mieux que le carré de "que dalle"….) bon tans pis…!

 

Les derniers ennuis de la tempête sont oubliés et remplacés par d’autres petits soucis, la garniture du ciel de plafond intérieur se décolle dans le carré et nous tombe sur la tête, la cuvette des WC dont les attaches en plastique se cassent est démantibulée, la drisse de génois se coince et bloque, l'hélice de propulsion vibre, le tableau de bord manque d'étanchéité, la "pétole" s’installe et du coup la consommation de gazole devient inquiétante. Il manquerait plus qu'un oiseau nous chie dessus…

 

Justement, là haut, dans ce ciel azuréen d'un bleu puissant, dépourvu de nuages, évoluent des paquets d'oiseaux aux larges ailes déployées, tournoyants sans efforts qui semblent danser une ronde infernale imitant à s'y méprendre à un combat aérien, où tout à coup, certains entament un piqué d'une vitesse considérable et perforent la mer d'une rapidité inouïe comme dans un "crash", puis en ressortent peu après, surgissant soudainement de l'eau, victorieusement, en emportant comme proie un poisson malchanceux qui pensait que cela n'arrive qu'aux autres.(Comme cela s'était d'ailleurs passé jusqu'à présent), sauf en ce jour funeste où il fut pris par leur redoutable bec d'une mortelle précision,  il sera bientôt englouti en direction d'un gosier avide de protéines animales dont l'origine certifiée n'aura échappé à personne ici, ce jour là, nous en sommes les témoins…

 

 

(Les dauphins) 

 

Nous sommes accompagnés par un groupe de dauphins, une petite dizaine je suppose, durant plusieurs minutes, ils font des cabrioles à coté du bateau, foncent devant l’étrave comme s'ils faisaient la course avec nous, se retournent sur eux même, avec leurs airs rigolard, c’est comme une fabuleuse bande de potes qui font les pitres pour nous faire marrer, nous les filmons et prenons un maximum de photos (dont beaucoup sont ratées car le dauphins ne prend pas la pose quand il est en l'air (il faut le savoir…) Ces animaux semblent et sont certainement doués d'une intelligence supérieure à un pack de boite de sardines en promo de chez "Carrefour" (d'ailleurs ils ont toute leur tête: eux.), nous avons entendus dire que les marins qui avaient des chiens ou des chats à bord, entendaient les dauphins en approche du bateau avant même qu'ils ne sortent de l'eau ( comme quoi l'oreille fine ça existe, pas la mienne parce que j'ai "entendu dire", mais celle des chiens et des chats bien sûr…)




*      8) Cabo Verde

 

Archipel redoutée par certains pour son insécurité et bobards pour d’autre, au passé colonial Portugais qui les ont découvertes en 1456, régulièrement frappées par la sécheresse et base de rassemblement pour des esclaves noirs avant de partir aux Amériques, indépendantes en 1975 ces îles constituent un point de départ pour une transatlantique, mais certains partent directement depuis les Canaries avec un trajet en mer plus long.

 

 

Sal

 

Arrivée le 9 décembre à 5 heures du matin après 712 miles et 8 jours de navigation à "La Palmeira" sur l’île de Sal (qui signifie sel), il fait nuit noire, nous évitons quelques tonnes flottantes pas éclairées puis des casiers de pécheurs non signalés pour s’approcher des bateaux au mouillage, afin de ne pas être trop près de leurs chaînes et ancres je décide de rester en retrait et mouiller en arrière de ces derniers, on y verra mieux au lever du jour…

 

L’heure est TU – 1 maintenant ici. Le jour levé nous devons accomplir les formalités d’entrée sur le territoire (la clearance), nous ne sommes plus en "Europe" alors maintenant pour chaque pays étranger visité nous devrons nous plier à ces convenances,  nous gonflons l’annexe pour aller changer nos euros contre des Escudos Capverdiens, rejoindre la douane, la police et les divers services pour les formalités. C’est long, il faut remettre nos passeports, qui sont gardés le temps de vérifications,  puis l'on doit se rendre au service de l’immigration, payer une taxe de 500 Escudos et pour la monnaie c’est raté le préposé n’en a pas…Donc il garde tout…Bon, c’est pas cher, mais c’est comme ça …

 

Nous achetons du gazole avec nos bidons dans un hangar à coté d’un terrain vague servi par un Capverdien en haillons, grâce à une antique pompe à main et tiré d’un fût de 300 litres cabossé aux couleurs douteuses.

 

Il faut également s’approvisionner en eau qui est stockée dans un petit bâtiment au milieu de la ville où nous devons faire la queue, de longues minutes seront nécessaires, dans l’immédiat 40 litres ferons l’affaire.

Des pécheurs viennent d’arriver dont les barques colorées et chargées arrivent au port,  la foule se presse, c’est la criée, on se fraye un passage parmi la cohue, nous choisissons deux petits poissons qu’ils  préparent, vident, lavent et finalement,  nous les offrent…

 

En retournant à bord on croise une tortue marine et nous voyons un voilier Français au mouillage qui nous demande pourquoi avoir mis notre ancre si loin des autres, je lui explique notre arrivée nocturne et il dit que des places se libèrent plus près et plus pratiques pour débarquer, évidement je l'avais prévu et dès notre retour à bord je prépare la manœuvre, mais là il y a un hic, il est impossible de remonter le mouillage, il est bloqué par 6 mètres de fond, je met le moteur en marche et contourne la zone pour tenter de libérer le tout, mais rien n’y fait.

 

 

(Le p'tit bleu clair)

 

alors je plonge pour voir où est le problème et découvre que la chaîne s’est coincée sous un gros rocher, impossible à bouger, pas plus qu’à arriver à dégager l'ancre, comme quoi, en navigation aussi, faut bien savoir où on va mettre sa quille…

Je replonge, remonte respirer, replonge et recommence pour réessayer, mais les écrans de contrôle s’agitent dans mon cerveau, les compteurs s’allument en rouge. Alarme!... Ils m’indiquent que ma capacité respiratoire ne me permet pas une autonomie suffisante et m’interdit formellement une immersion prolongée en ces milieux aqueux salinisés. Ordre m’est donné par moi-même de refaire surface dans les meilleurs délais et même avant si possible…

"Aqueux!"...."Ah!... Que", je m’obéis !…Et peut enfin respirer, (ce qui était déjà une habitude),  je ne peux pas m'en passer, d’ailleurs j’arrête plus, déjà qu’avant je le faisais régulièrement…

 

 

(Le grand bleu foncé)

 

On va voir à terre avec l’annexe, (où l'on recroise une tortue marine), pour chercher si on peut trouver de l’aide auprès des pêcheurs locaux qui ont l'habitude de plonger et on nous en indique un, dont le réservoir pulmonaire devrait compenser sans aucun doute sa consommation d’oxygène avec une capacité de réserve bien supérieure à ce que l'on connait habituellement en circonférence linéaire thoracique, relevée en centimètres conventionnels élaborés à partir du système métrique international, reconnu par la communauté scientifique mondiale et établit depuis "y'a longtemps", (en gros et sans entrer dans les détails, entre 1792 et 1799 par Méchain et Delambre jusqu'au dernier décret du 1er janvier 1962 le validant avec six unités de base.)

 

Il comprend ma demande, car je l'ai interprété de façon remarquable grâce à des gestes expressifs et animés que j'ai appris en jouant naguère au "Pictionnary" et qui se passent de traduction explicite formulée dans la langue locale actuellement pratiquée.

 

On se met d'accord sur le montant dédié à sa future prestation, exprimé en monnaie locale hors taxes et non soumise aux futures évolutions monétaires pouvant survenir dans les prochaines minutes, ni à d'hypothétiques variations imprévisibles d'une marée éventuellement contradictoire avec les tables prévisionnelles à venir, nous nous basons sur le coût estimé d'une valeur totale nette: "T.M.E". (Toutes Moustaches Essuyées.)

 

Donc!... il est d'accord!… Avec l'annexe,  je l’emmène à bord, tel quel, vêtu d’un simple short multicolore en polyester basique d'une incertaine et troublante provenance probablement indéterminée. Dont les couleurs s'entremêlent facétieusement, (manifestement issu d'une machine robotisée de série dont la production quantitative à défaut d'être qualitative n'a rien à envier aux fabrications internationales asiatiques et n'est pas nécessairement interdit de penser qu'il puisse en tirer son origine).

 

Il est prêt "pareil"…(En short). Il plonge, remonte me fait signe de démarrer le moteur et d’avancer un peu, replonge, remonte me fais un autre signe d’aller un peu à gauche, replonge, remonte, aller un peu à droite maintenant, plonge, remonte puis replonge et remonte enfin ….Boulot terminé, bateau libéré, je récupère le bonhomme, vais m’ancrer plus près de la ville, lui donne son billet habillement négocié par avance, puis le raccompagne à terre, habillé comme il était venu, mais en "tout mouillé"…La chaleur présente pourvoira rapidement à ce que notre plongeur retrouve son taux d'humidification usuel par l'évaporation ambiante naturelle et retournera rapidement dans l'état où je l'ai découvert précédemment (sec!)

 

C’est en "Aluguer" que l’on va visiter Santa Maria au sud de l’île Sal. "L’Aluguer", est un petit monospace de 8 à 9 places, voir plus, du genre Toyota, mais des fois y'a pas de marque… Le plus souvent,  avec beaucoup de petits bruits qui ne sont pas d'origine et affublés en général de vibrations inconnues au catalogue constructeur, équipés de sièges laissant à penser que les derniers clients étaient une porté de gorets d'une centaine de kilos chacun et agrémentés quelquefois d'odeurs douteuses dont ont ne sait à qui en attribuer la paternité, ils ne partent que remplis complètement, les chauffeurs "draguent" littéralement toute la ville à la recherche de personnes qui souhaitent partir avec eux, ils disposent même certaines fois de rabatteurs pour les aider à trouver des clients et une fois pleins, (ça peut durer une demi heure), ils partent à destination à des vitesses qui feraient sauter les képis de nos gendarmes et court-circuiter les radars, ce sont les "Taxicos" locaux et qui font le trajet pour une somme équivalente à 1 ou 2 euros.

 

A l’arrivée, une belle plage, quelques magasins d’artisanat sur bois et de souvenirs, un commerçant nous demandera de lui renvoyer une carte postale de notre pays quand on reviendra en France car il en fait la collection et il nous a fait voir ses dizaines de cartes postales de plein de pays différents. (On lui en à envoyé une à notre retour en France, bien sûr).

 

Après trois nuits passées à "La Palmeira" et après avoir souvent recroisé la tortue marine, nous apprendrons que des enfants lui avait attaché un fil à la patte, ce qui fait qu'elle restait toujours dans la même zone...

 

 

Boa Vista

 

Le 12 décembre, c’est Boa Vista, une île plus au sud, presque sans végétation avec des plages de sable désertiques merveilleuses, après une navigation de 36 miles, mouillage à Sal Rei vers 18 heures par 6 mètres de fond, mais là, le moteur, (sans doute content) refuse de s’arrêter, je dois farfouiller sous le capot pour trouver un bouton qui me permette de lui faire fermer son …Arrivée de carburant et de cesser son activité temporairement, laissant ainsi le silence reprendre ses droits sur le son d’un échappement au bruit galopant dont la persistance en cette heure tardive à présent me trouble de façon ostentatoire malgré le bénéfice non négligeable dont je peux profiter aux moments opportuns de cette mécanique bien huilée au demeurant….C'était le système électrique de coupure de gazole qui s'était coincé.

 

La ville de Sal Rei, très typique, est constituée de maisons basses, style Ibérique, avec quelques commerçants ambulants ça et là, puis d’autres, dans de petits locaux sans enseignes dont il faut connaitre l’existence à moins de se fonder sur le hasard, si l’on souhaite acheter quelque denrée par ici.

 

Les rues sont pavées selon les normes en vigueur à l’époque de la colonisation Portugaise, quelques bâtiments de plusieurs étages émergent parmi les habitations basses, ainsi que d’anciennes églises patinées et conservées dans leur" jus", avec bonheur pour certaines.

 

 

São Nicolau

 

Départ le 13 décembre pour Tarrafal, sur  l’île de São Nicolau, situé à 95 miles et donc une nuit en mer sans vent avec un ciel auréolé d’étoiles très lumineuses et brillantes, 22 heures de navigation dont 12 au moteur seront nécessaires pour ce trajet vers l'ouest, nuit de repos à l’ancre et visite de l’île en "Aluguer", où l’on retrouve des pavés, identiques et néanmoins dans un état tout à fait acceptable que dans les autres endroits des villes Capverdiennes visitées jusqu'à présent, mais là les maisons sont plus "Européennes" dans leur style.

 

C'est parti pour aller se payer un petit resto, une langouste sera au menu, délicieusement et longuement attendue dans cet espace îlien tropical où les compteurs du temps ne fonctionnent pas selon les critères que nous leur avons attribués en Europe continentale, c'est avec une grande satisfaction que la dégustation s'est enfin effectuée d'une façon, qui malgré l'impatience difficilement contenue, pouvait tout de même laisser à penser de la relative imminence d'un appétit empressé et contrarié par l'écart des temps morts situés entre les espaces creux nichés au milieu des aiguilles notifiant les minutes écoulées depuis leur inexorable parcours.

 

Bien plus tard que prévu donc, à notre retour où nous avions fait garder notre annexe par des gamins pour quelques sous, on la retrouve, alors que la nuit est déjà tombés et que nos "gardes" sont remplacés par d'autres "Niños",  nous retournons à bord quand au milieu du trajet le moteur s’arrête net….Je crois qu’on a oublié de prendre les rames de secours!…C’est alors qu’un gars qu'on croise avec son annexe à tout de suite compris le souci, sans une question et sans un mot,  il envoi un bout et nous remorque jusqu'à notre bateau, sympa…Ouf!...

 

 

São Vicente

 

Le 16 décembre, partis pour mouiller en route au bord d'une plage, nous avons dû renoncer en fonction du vent mal orienté pour nos prévisions et rejoindre directement Mindelo à São Vicente situé à 50 miles à l'ouest c'est environ 14 heures de navigation pour arriver vers 20 heures à la nuit tombés au port, un vent de plus de 20 nœuds accompagne en permanence la progression vers l’entrée au port qui sera un grand moment d’angoisse, dans cette large baie de nombreux cargos sont stationnés sans aucun feux de mouillage, certaines épaves y sont également présentes et pas mieux signalés, d'autres navires se déplacent et manœuvrent équipés d'un minimum d'éclairage quant il y en a, la marina fermée à cette heure nous contraint à mouiller dans la baie et envoyer l’ancre au fond de cette anse à un endroit suffisamment dégagé et d'une sécurité minimale pour la nuit qui se passe du mieux possible.

 

 Dès le lendemain matin nous prenons une place à la marina de Mindelo où un avitaillement complet pour une estimation d'un mois de navigation sera nécessaire avant d'entamer notre traversée océanique dans de bonnes conditions de sécurité.

 

 

(Feliz Navidad)

 

La ville est "typiquement typique", l’ambiance colorée, les marchés animés, les boutiques en fête, car c’est bientôt Noël, " Féliz navidad " on dit ici, les pères Noël en tous genres envahissent les étals des commerçants, des décorations de fête et crèches sous une chaleur tropicale contrastent avec la température du lieu, on est plutôt habitués à voir cette ambiance dans notre froid d’hiver, ça change…

 

 

(René-Marc, mon frère.)

 

J’apprends le décès de mon frère survenu en France par un appel téléphonique de ma famille, évidement je suis très affecté de cette mauvaise nouvelle et je ne peux bien sûr me déplacer d’ici pour aller en métropole. Mes pensées sont mobilisées sur cette annonce funeste, malgré la difficulté à l’accepter, je dois malheureusement m’y résoudre. La fragilité de la vie impose de lui en donner un sens et c’est en continuant cette aventure que je peux lui trouver un chemin parmi les différentes voies qui peuvent se proposer, la vie reste aléatoire et relativement éphémère pour qu'on doive la gérer au mieux de nos possibilités, n'en connaissant ni l'issue, ni le terme, mon avis est qu'il est sage de profiter des instants présents, ne sachant ce qu'en réserve l'avenir."Carpe Diem" Pourrais convenir, reste à chacun de se déterminer en fonction des critères qui lui conviennent.

 

 

(Le "Didier")

 

A "Mindelo", pour réapprovisionner  il faut trouver des bouteilles de gaz, une laverie et faire l’avitaillement pour préparer notre transat prochaine. La ville grouille de commerçants en tous genres, il va falloir se repérer….Et alors en sortant de la marina, un jeune homme s’approche pour nous proposer ses services de guide ( il dit se nommer "Didier"), aides en tous genres, renseignements, traductions, etc.…Il parle un Français correct et nous lui demandons où trouver du gaz et une laverie, il nous accompagne aux deux magasins recherchés, traduit également les détails de nos désidératas avec les commerçants et nous aide à nous diriger dans la ville, en discutant, il nous explique qu’il fait partie de ces habitants de Mindelo  pour qui la vie est difficile comme la plupart de la population par ici, il à deux enfants en bas âge et souhaite seulement comme  contribution d'aller en pharmacie afin d’avoir du lait pour eux, nous l’aidons en lui achetant ce dont il a besoin et qui reste très en deçà de l'acceptable pour nous, je lui propose d’aller boire un coup dans un café vers le marché couvert de Mindelo, il ne veut rien boire, mais préfère qu’on lui offre un plat local qui coûte a peine le prix d’une bière, ce sera la «Tchoutchouca » plat spécifique du pays comportant des gros haricots, des fèves, du mais, de la saucisse et divers féculents qui incitent à ne pas avoir besoin de se resservir deux fois vu la consistance du contenu de l’assiette qu’il dévore tel le lion affamé dans le désert du Kalahari se jetant sur un paquet de croquettes à la gazelle lyophilisé gratuit dont la date de péremption n’est pas arrivée à terme,(mais c’est dans un autre contexte…) .Tant qu’à faire je lui rajoute une bière au menu pour faire "descendre le tout" (à Didier, pas au lion…)

 

 

(La rencontre)

 

Ghislaine lui demande s’il connaît la maison de Césaria Evora, la grande chanteuse internationale, la diva aux pieds nus, bien sûr, dit il elle n’est pas loin d’ici, alors nous partons voir sa maison pour en prendre une photo, c’est une villa assez ordinaire mais très convenable, la porte est entrouverte et notre ami interpelle une femme devant la porte qui semble t'il fait partie du personnel employé et avec laquelle il s’entretien en Portugais, puis après une courte absence où il entre dans la demeure s'entretenir avec l'on ne sait qui…Il nous fait signe d’entrer: nous sommes ses invités.

 

Césaria Evora est là! Dans une pièce, assise, en train de fumer une cigarette en buvant un petit rhum arrangé, elle nous salue et nous propose un petit verre que l'on accepte volontiers même si ce genre de breuvage se boit rarement à 10 heures du matin…Par contre il est super bon…

 

Elle ne parle pas trop bien notre langue et notre ami "Didier" traduit.

 

On reste une bonne demi-heure à parler de la sortie de son dernier disque avec des chanteurs connus dont certains sont des artistes français célèbres, puis de ses futurs projets à venir dans les différents pays du monde.

 

Nous avons le privilège de visiter la pièce où se trouvent les souvenirs de ses tournées internationales, et également ses disques d’or, ses trophées, etc.… qui sont accrochés aux murs.

 

Elle nous présente ses enfants et les personnes de son entourage présentes dans sa maison.

Sa gentillesse et sa simplicité sont remarquables, l'empathie qu'elle dégage est palpable et dans cette atmosphère charismatique, je suis très ému de cette rencontre, où s'ajoute le contrecoup de la charge émotionnelle des informations que j'ai reçues dernièrement.

 

Puis nous repartons en gardant le souvenir d’une personne d’une grande affabilité et d'une aisance d'âme remarquable malgré son immense talent. Ce fût une grande rencontre.

 

On file ensuite vers le marché couvert de Mindelo, où une boutique vend son dernier CD…On achète!...

 

A la marina nous faisons connaissance avec des bateaux voisins du notre, qui pour la plupart se préparent activement comme nous à la grande aventure de la traversée de l’océan Atlantique, nous communiquons souvent, si les dates pressenties pour le départ diffèrent un peu, les motivations sont semblables, les interrogations se ressemblent, les équipages partagent des sentiments mêlés indiciblement d'appréhension et de succès à venir dans un projet depuis longtemps prévu.

 

En attendant que les alizées soient bien établis, nous finissons de faire ce que l'on a commencé la veille et qu'on n'a pas terminé, c'est-à-dire: rien…

 

 

Santo Antaô

 

Nous visiterons également l’île de Santo Antaô en ferry au départ de Mindelo (où nous laissons notre bateau amarré à la marina), elle est à une heure de traversée et nous y partons pour deux jours avec nos amis de ponton où nous louons un gite pour la nuit, c’est la plus belle île de toutes celle que nous avons vus jusqu’à présent, végétation luxuriante, là, des plantations de café sont légion, plein de cultures luxuriantes et diverses recouvrent de nombreuses parcelles, nous faisons une marche de plusieurs heures et louons un "Aluguer" avec chauffeur pour traverser une partie de l’île, , nous empruntons une voie où il faut rouler à très faible allure dans le gué d’une rivière asséchée, malheureusement nous risquons de perdre trop de temps et louper notre retour en ferry pour Mindelo, on doit demander au chauffeur de faire demi tour…Là on regrette de manquer de ce que l’on à peut être de plus précieux dans la vie, c'est-à-dire de temps…Mais nous l’avons organisé de cette façon car les alizées se sont réveillés et bientôt il nous faudra partir.

 

Le réveillon de Noël se fera avec deux couples d'amis de ponton de deux bateaux différents, il aura lieu sur celui qui dispose du plus large espace à bord, un "OVNI 445" de plus de 13 mètres amarré à coté de notre bateau.

 

Une super soirée sympa, mais qui ne laissait aucun espoir sur le passage du père Noël par la cheminée, y’en a pas sur l’OVNI 445 !…

 

Ce n'est qu'un au revoir!… Ce n'est qu'un au revoir!  Oui, nous nous reverrons!… En effet nous nous reverrons plus tard, avec nos amis après la traversée. "Ti Punch" garanti.

 

 

 

*      9) La Transat.

 

 

(Le départ)

 

Lundi 27 décembre, Il est 14h30, c’est le moment choisi pour partir de l’autre coté de l’océan, alors que la chaleur sous les tropiques reste encore élevée à cette époque de l’année, il faut bien compter trois semaines seuls en mer afin d’arriver à l’endroit espéré, c'est-à-dire au sud de la Martinique.

 

L'avitaillement à été fait ces derniers jours à Mindelo en boites de conserves, un peu de fruits et de frais, mais pas trop afin d'éviter qu'ils ne s'abiment avant d'être consommés, de la farine et de la levure pour faire du pain, nous veillons également à ce que notre trousse de pharmacie soit complète. Nous sommes également équipés de livres pour cultiver notre enrichissement personnel au cas où celui-ci  laisserait entrevoir des signes de faiblesses durant ce parcours qui nous coupera du monde des humains pour un temps encore indéterminé.

 

Nous appareillons et au loin on peut voir les voiles des bateaux de nos amis partis peu avant nous, leur bateaux plus longs et plus rapides ne seront pas rattrapés, mais cela ne nous importe pas, pas plus qu’eux non plus. Chacun fait sa traversée à son rythme.

 

Désormais seuls maintenant dans cet océan, la terre s'efface petit à petit, mangée par la mer dans des gerbes d'écumes argentées qui jaillissent et déferlent en éclats blanchâtres aux sommets éphémères, nos voiles blanches s’animent dans les souffles d'airs chauds des alizées d’est, ils nous aident de leur invisibles forces aériennes et le courant qui est leur ami nous pousse vers les Caraïbes, dans la direction que nous avons choisie dans nos rêves d'ouest tropical.

 

Nous passons au large de Santo Antao et bientôt la nuit nous enveloppe dans son sombre écrin de noirceur feutrée, parsemé de quelques étoiles qui s’illuminent et scintillent au fur et à mesure de notre progression nocturne, elles semblent être les témoins de notre avancée dans cet élément liquide dont on ne perçoit plus que le feulement le long de la coque, la solitude s'insinue dans la lourdeur de l'obscurité qui nous enveloppe et désormais nous accompagne jusqu'au petit matin, isolés, flottants dans cette immensité fluide d'où ne peuvent émerger que de rares créatures venues du fond de l'eau dont le mystère reste entier à notre faible connaissance de cet univers.

 

C’est avec les roulements de quarts de trois heures que nos nuits seront désormais rythmées, l’obscurité se fait dans le carré , la pénombre est faiblement éclairée par le traceur de carte qui indique la route à suivre, la vitesse du bateau, sa position, la trajectoire suivie et la distance qui reste à faire, la radio VHF quant à elle, permet une veille et contribue à d’éventuelles informations venant d’autres bateaux.

 

 

. (La pêche à la dorade)

 

Mardi 28 décembre, alors que les alizées bien établis, emportent notre voilier aux alentours de 5 nœuds par vent arrière de force 5 à 6 environ sur une mer, certes forte et houleuse mais néanmoins les écarts du bateau restent négociables par notre régulateur d’allure, des vagues de plusieurs mètres venant de l’arrière donnent l’impression d’être dans un ascenseur sans contrôle, en levant le cul du bateau, puis se glissant par-dessous, elles soulèvent ensuite l’avant pour recommencer dans un rythme incessant de tangage et de roulis, peu de voiles suffisent pour bénéficier d’une vitesse suffisante et n'être trop malmenés dans cet océan Atlantique mouvant au hasard du rythme de ces vents chargés d’air chaud venus d’Afrique.

 

Ghislaine effectue un prélèvement dans le milieu marin par 16°33’ nord et 28°32’ ouest consistant en une superbe dorade coryphène dont la destinée amorçait visiblement un virage qu’elle n’attendait pas et qui fera plusieurs repas contre son gré… Car elle ne voulait pas… (La dorade, pas Ghislaine…)

 

Pour elle "l’au-delà" consiste à sortir de "l’eau" pour aller "là", (c'est-à-dire, la poêle)

 

Nous avons dû lui faire boire un peu d’alcool fort issu d’une bonne bouteille (Je ne dispose pas de morphine à bord…) afin qu’elle puisse se préparer à la séparation entre son âme et son corps, qui de toute façons à ce moment crucial n'auraient aucune chance de réussite de se retrouver réunis, même avec de la super glue à base de cyanolite sans qu’elle ne souffre de manière intempestive de ce changement, qui loin d'être virtuel, engage son avenir de façon irrémédiable et durablement, Une fois le congé de son âme pris, ce fût durant plusieurs repas que sa chair pu nous rassasier  des indispensables protéines élémentaires et compensatrices dont nous avions besoin au cours de cette traversée.

 

Mercredi 29 décembre, il fait beau, le soleil et la chaleur sont de la partie, les mouvements incessants et tranquilles du moment sont apaisant, à l’horizon sur l’ensemble de notre vue, rien, aucune terre, pas d’humains, quelques oiseaux tournants planent dans le ciel dégagé guettant les bancs de poissons pour leur dîner.

 

Des milliers d’éclats scintillent sur l’océan renvoyant autant de petits soleils dans nos yeux,

Qui éblouit par tant de lumière cherchent un abri dans l’ombre de nos voiles sur l’eau bleue. 

 

De temps en temps un oiseau de mer nous survole à bonne hauteur, nous regarde et repasse,

Tourne en rond plusieurs fois tout autour du bateau, vire d’une aile sur l’autre puis se lasse

 

Il repart vers une lointaine destination que lui seul connait, porté par le vent qui est son ami,

C’est de son souffle à travers les embruns qui l’emportera à l’endroit où bientôt il fera son nid.

 

Là bas au loin le ciel flamboie de mille couleurs à l’approche du coucher de soleil sur l’horizon,

Nous ne savons encore combien de jours et de nuits seront nécessaires  pour arriver à destination. 

 

Bientôt la nuit qui avance nous enveloppera entre le ciel et l’eau, dont seule la lune dans sa clarté,

Pourrait dans un espace qui serait sans nuages, si elle le veut, alors bien vouloir nous éclairer.

 

Dans la chaleur moite du large notre étrave glisse doucement et de son museau fend les vagues,

Nous avançons dans une houle et un courant qui porte à l’ouest et naviguons au grand largue.

 

Le temps s’écoule au gré de vagues qui parfois déferlent, puis l’esprit vagabond au fil de l’eau,

Autour de nous le paysage est grandiose, alors c’est là qu’on se dit "putain qu’c’est beau".

 

 

(La mort du régulateur)

 

Jeudi 30 décembre, il fait nuit et c’est le tour du quart de Ghislaine en ce moment, à 4 heures du matin elle vient me réveiller (encore tout à coup !) La lune qui était derrière le bateau est passée devant, bizarrement…

 

Je me lève, constate la position des coordonnées géographiques sur le traceur et m’aperçoit que le bateau a fait demi tour…

Que s’est il passé!  me dit je soudainement avec la vivacité, la rigueur et la spontanéité qui me caractérisent d'ordinaire, et ce malgré l'arrachement brutal du sommeil paradoxal dans lequel j'étais établi  profondément, pas plus tard que y a pas longtemps!…Je regarde, inspecte, scrute ….Puis découvre que la pale immergée du régulateur d’allure qui régissait la direction du bateau en fonction du vent s'est cassée et a disparue complètement, nous avons dû heurter quelque chose, objet flottant ou animal non identifié…

 

Nous devrons nous passer de notre régulateur d'allure qui maintenant est complètement inefficace jusqu'à ce qu'on remplace cette pale en bois sous garantie et sous l'eau!...

 

Je replace le bateau dans la bonne direction et mets en route le pilote automatique électronique pour la suite du voyage… On devra tenir compte de sa consommation de courant qui n'est pas négligeable.

 

 

Vendredi 31 décembre, Notre moyenne de distance est de 100 miles par 24 heures, nous passons maintenant la longitude qui nous fait changer d’heure, moins une sur ma montre maintenant, c’est UTC -2.

 

Avec un réservoir de 170 litres d'eau à bord et 3 réserves souples de 20 litres chacune, notre autonomie est de  230 litres,  plus une quinzaine de bouteilles d'un litre et demi, nous devons économiser, on se lave les endroits stratégiques avec un minimum d'eau, en faisant attention on y arrive très bien. (Environ cinq litres par jours chacun. (Par sécurité j'ai emmené du vin, au cas où….A l'arrivée, il nous est resté de l'eau….)

 

Parfois surgissent, tel des missiles tirés du fond de l’eau, des dizaines de poissons volants et brillants,

Leur trajectoire incertaine varie d’une incroyable longueur, plusieurs centaines de mètres le plus souvent,

 

Ils volent de leurs ailes longuement avant de disparaitre précipitamment dans un petit flop distant et discret

Au milieu de méandres aquatiques dont les mystères se referment sur leur destination finale à tout jamais.

 

 

Pour le réveillon du Jour de l’an, c’est en se tenant fermement dans le carré que nous célébrons ce moment de l’année en cramponnant nos assiettes et nos verres, au menu une boite de foie gras, un confit de canard et une bonne bouteille de vin, un peu de champagne qu'un ami nous avait offert avant notre départ, néanmoins les festivités seront très approximative car la houle 2011 vient d’arriver. On a presque rien bu que ça tangue encore, comme les jours ou l'on boit rien, c'est ça d'être marin…

 

 

(2011)

 

Le samedi 1er janvier, c’est la nouvelle année, nous croisons au loin un autre voilier que l'on ne peut identifier, je lui souhaite la bonne année à la radio VHF en Français et en Anglais (il nous répondra près d'une heure après, je pense qu’il venait de comprendre le message…)

 

La mer à été forte, les vagues ont balayées le pont, je trouve un poisson volant, puis un petit calamar morts sur l’avant du bateau…Pour les étrennes j’aurais souhaité autre chose…Vu l’état déjà avancé de décomposition de ces petits animaux, je crois que c’est trop tard pour faire un échange…

 

 

(Si je peux me permettre)

 

Dimanche 2 janvier, en navigation je fais du pain à bord "d'Erreip", qui bien sûr est le bateau de "Pierre" (si je peux me permettre cette anagramme), pour quelques jours grâce à la farine que dans notre immense sagesse nous avions emporté ainsi que la levure indispensable à cette réalisation dont la réussite est conditionnée par le talent et la préparation de l’intervenant, devant la difficulté de la tâche en milieu marin, chaud, humide et mouvant c’est avec beaucoup d’indulgence que je juge le résultat  après l’avoir goûté. Finalement ça aurait pu être pire et j'aurais été dans le pétrin…En fait: c'est une question de tour de main: Il faut que je me tâte la main ou je rate le pain. (Si je peux me permettre cette contrepèterie). Oui,  il faut mettre la main à la pâte car c'est le fameux coup de patte qui fait le pain et il faut le coup de main pour tourner la pâte et patati et patata…

 

Lundi 3 janvier, sachant que le soleil se couche toujours à l’ouest et qui depuis des milliers d’années se lève à l'est, au loin ce soir, je le vois, il va s'engloutir dans l'horizon, (si je peux me permettre cet anathème) pour finalement disparaître furtivement, à chacun ses petites manies, non ?... (Si je peux me permettre cette épigramme).

Je profite donc de ces instants pour relever sa position afin de pouvoir la comparer aux autres soirs qui se suivront pour être un peu plus sûr de notre trajectoire en cas de panne générale d’instruments de navigation.

Le ciel virant du bleu au noir intense quand l'astre de la nuit (si je peux me permettre cette périphrase) n'accompagne pas le voyage, nous nous enfonçons vers ce ténébreux écran sans aucune visibilité, en espérant ne pas rencontrer un OFNI ((Objet Flottant Non Identifié) (si je peux me permettre cet acronyme) l’étrave tranchant la noirceur de l'onde  (si je peux me permettre cette métaphore) dans un murmure de glissement feutré et angoissant de glouglous (si je peux me permettre cette onomatopée) et ne sachant ce qui peut se trouver devant le bateau, donne certaines fois une angoisse à faire se dresser les cheveux de la tête (si je peux me permettre ce pléonasme), dans l'obscurité de cette petite route de plusieurs centaines de miles (si je peux me permettre cet euphémisme) qui nous avalent et paraissent infinis (et l’infini c’est loin, pas trop au début, mais surtout au bout…)

Ces nuit rythmées par des quarts de trois heures dont chacun est une éternité (et il est dit dans les écrits que l’éternité, dans sa configuration quantique événementielle de l'instant furtif, c’est long, mais surtout sur la fin…) (si je peux me permettre cette parabole) de toutes façons: quand c'est parti! C'est parti! (si je peux me permettre cet aphorisme).

Heureusement la voute céleste constellé d’étoiles nous fait une super déco (si je peux me permettre cette apocope) dont l’arrangement pratiquement inchangé d’une nuit sur l’autre à nos yeux d’amateurs, sombrement éclairés (si je peux me permettre cet oxymore), donnent l’impression d’être accompagnés par ces milliers de petits points brillants chaque nuits, dont l’usage aurait voulu qu’on en connaisse le nom de la plupart, mais bon… Pour nous, notre culture limitée dans ce domaine…et…

 

Y'en a!...Beaucoup, comme… tous ces lointains petits points lumineux

Y'en a!...Beaucoup, comme les nombreux mots dans les langues étrangères qu'on veut apprendre…

Y'en a!...Beaucoup, comme toutes ces choses. Dont on ne sait qu’un petit peu, par rapport à tout ce qui existe.

(Si je peux me permettre cette anaphore)

 

 

Mardi 4 janvier, calme plat, 4 heures de moteur nous aident à faire nos 100 miles de moyenne dans la journée en règle générale ça dépend de la mer et du vent… mais c'est pas aussi sûr que l'un et l'autre font deux…

 

 

Dans cet univers de solitude sur ce liquide mouvant, nous avançons entre deux pôles

Nous pensons bien sûr à nos proches souvent, ceux qui sont loin, restés en métropole.

 

On aimerait partager ces moments de quiétude dans cette douce torpeur de balancement

Si ces conditions sereines de voyages étaient l'habitude, ils apprécieraient certainement.

 

Avec ce sentiment d’être "seul au monde" entourés de cet horizon circulaire sans fin….

Loin de tout, sauf de soi-même, dans cette ronde océanique en relation avec le lointain.

 

Sûrement pas dans les moments de "baston" avec de la mer forte,  évidement, je me doute…

Ici il faut prendre le bon comme le moins bon, c’est un "deal", le "pack" pour faire la route.

 

 

Mercredi 5 janvier, les journées s’écoulent selon les mouvements incessants du navire qui dépendent étroitement de l’état de la mer, l’horizon reste le semblable sur 360°, le soleil, toujours présent depuis notre départ, ses levés et couchers invariablement aux mêmes endroits cardinaux, le vent toujours d’est.

 

La nuit quand la lune est là, elle nous tourne autour et de la face circulaire de son disque sphérique qui éclaire l'obscure  noirceur de l'océan, mais en son absence, de nombreuses étoiles se découvrent que nous essayons de reconnaître, elles nous illuminent d'abondant éclats brillants comme d’un nombre incalculable de têtes d’épingles d’or dont on aurait piqué le firmament de façon aléatoire et qui nous veilleraient, reliés à une immense toile dont les fils invisibles les réuniraient à la manière occulte de la représentation énigmatique des signes du zodiaque dont la symbolique native de la nuit des temps reste encore secrète aux novices en cette matière mystérieuse et ésotérique.

 

Jeudi 6 janvier, de temps à autre lors d’une chute de vent on met un peu de moteur ce qui permet également de recharger les batteries grâce à l’alternateur du bord,  nous restons à l'affût de tous les bruits  enclins à devenirs suspects, l'analyse de chacun peut être révélateur d'une avarie en devenir qui pourrais avoir de fâcheuses conséquences dans un avenir indéterminé et le fait de pouvoir remédier au plus vite à une solution peut être déterminant,  je trouve que l’hélice vibre un peu à certains régimes…Espérons qu'elle tiendra jusqu'à l'arrivée…

 

 

(Boum…)

 

Ce soir un choc sourd à l’avant du bateau nous surprends, mais nous n’en connaissons pas la cause, on a dû heurter un animal ou quelque chose d’autre… Ca reste un mystère.

Apparemment, aucun dégâts…Je suis soulagé, espérons seulement que la route est libre devant nous et que ce n'est que de l'eau que l'étrave rencontrera, même si il y a un peu de sel dans l'aventure.

 

Le vendredi 7 janvier, encore un changement encore d’heure, il en est ainsi tous les 15° de longitude.

 

 

(Ca joue !)

 

Un petit air sur mon harmonica que j’ai pris la peine d’emporter nous berce en même temps que l'océan et me rappelle s’il en était besoin que le temps qui s’écoule au long de notre trop courte vie ne permet pas de satisfaire les nombreuses passions qui nous intéressent, notamment, apprendre à jouer correctement d’un instrument de musique dans mon cas, je ne persisterais donc pas à souffler dans cet appareil dont la sonorité mal maitrisée risque de devenir incomprise, même par moi-même et malgré que mon auditoire reste restreint, puisque seule Ghislaine m'écoute en faisant mine d'apprécier cette musique, mais j'ai l'intime sentiment que cela ne saurai durer, je décide donc de mettre un terme, après une courte prestation à cette démonstration dont l'histoire si elle l'entend, n'en retiendra que des bribes inconsistantes et volatiles, à bon entendeur…

 

 

(Les baleines)

 

Samedi 8  janvier, il y a une grosse houle tenace, les vagues montent très haut à l’arrière du bateau, j’aperçois dans l’une d’entre elles une grosse masse noire, j'appelle Ghislaine et l’on voit cette forme se rapprocher de nous, passer tout à coté de la coque pour nous doubler, nous reconnaissons une énorme baleine d'environ la même longueur que celle du bateau, peut être plus, mais pas moins,  elle sera suivie par une quinzaine d’autres qui nous doublent toutes de la même façon, sauf la dernière qui au moment de nous dépasser se retourne pour nous montrer son ventre blanc puis disparait au loin dans l'océan. Nous sommes sous le charme, impressionnés par ces imposantes créatures qui nous ont rejoint puis dépassé imperturbablement pour regagner on ne sait quel endroit improbable et mystérieux pour des raisons que l'on suppose sans vraiment les connaitre, mais qui de toutes façons existent forcément, mais que l'on ignore quand même, bien qu'on peut certainement en deviner facilement le but si l'on s'en réfère à ce que l'on en a appris par ceux qui disent le savoir ….(comme quoi!...)

 

Dimanche 9 janvier, quasiment chaque soir le coucher de soleil nous gratifie d’un spectacle éclatant, de toute beauté et découvre ses couleurs qui se mélangent au fur et à mesure depuis sa dernière inflammation jusqu'à l’extinction intégrale du ciel, remplacé par une nuée d'étoiles dans la pureté de cette voute céleste qui rend cette fois encore la nuit plus belle que les précédentes, car au fur et à mesure de notre progression, nous prenons plus de temps pour les admirer sereinement.

 

Lundi 10 janvier, naviguer sur un bord préférentiel et deux ris dans les voiles sont nécessaires pour garder le cap voulu sans avoir à maintenir le bateau dans un roulis infernal, ensuite il faut en changer car le vent pile de l'arrière ne permet pas de conserver la route adéquate en l’absence de tangon, qui aurait été bien utile dans ce cas, alors quelques degrés sur bâbord puis sur tribord pour aller tout droit dans le sens des alizées d'un bord à l'autre en "zigzags-tout droit".

 

Du plancton aux couleurs fluorescentes à dominante de vert surgissent à la manière d'un halo émergeant de l'océan et défile le long de notre route maritime, se reflétant sur  la coque qui les révèle en tranchant de son étrave pointue les milliers de micros organismes agglutinés sur notre passage.

 

 

(Le coup de fatigue de Ghislaine)

 

Mardi 11 janvier, cette nuit, peu avant le changement de veille, en attendant Ghislaine qui doit me remplacer, j’entends un bruit inhabituel, je descends rapidement et la trouve évanouie dans les toilettes, je la sors de là, l’allonge sur la banquette du carré et la réveille avec un gant mouillé sur le visage, elle à du perdre la petite aiguille de son horloge interne…Enfin, sauvée…Du coup elle me vote sa confiance éternelle jusqu'à mardi prochain, (s'il ne pleut pas…)

La fatigue est présente dans cet enchainement de journées et de nuits de veilles dévoreuses de sommeils entrecoupés par ces rythmes de 3 heures aux sommeils trop courts, qui impactent durablement notre capital de lucidité, certaines fois en se tenant au matelas tellement les coups de gîte sont marqués, ballotés sans cesse et la journée à cuire sous la chaleur de ce soleil tropical, mais restons humbles et déterminés, nous n’avons d’autres choix que de continuer…

 

 

(Même pas peur…D'abord!)

 

Mercredi 12 janvier, très près de nous un groupe de trois orques énormes habillées de noir et de blanc, sans prétention, passent en rangs serrés derrière le bateau perpendiculairement et continuent leur avancée comme si elles ne nous avaient pas vu. Je préfère….Du coup je fais pareil…. (Celui qui les a pas vus…)  finalement tout se passe bien, c'est-à-dire: rien.

 

 

(Ca secoue!...)

 

Jeudi 13 janvier, c’est un force 7 qui nous pousse cette fois et force 8 le lendemain, pas de moteur, les voiles sont rentrées et rien qu’avec la capote nous avançons à presque 6 nœuds en se dandinant par vent arrière sur une mer très remuante.

Les journées et les nuits sont longues dans ces mouvements de roulis et de tangage ininterrompus et je suis impatient d’arriver à destination, dans ces cas, selon la configuration de la cabine qui sert de couchette on se cogne la tête puis les pieds, sinon dans l'autre sens, un coup à droite et l'autre à gauche, c'est selon, de toute façons on arrive toujours à dormir un moment à condition de rester crispé avec ses doigts au matelas, des moments ça se calme alors on se relâche et c'est seulement là, quand on se cogne que l'on se réveille…A moins de s'attacher avec des "sandows", mais j'ai pas essayé…(Si ça lâche!…)

 

 

Vendredi 14 janvier, la mer est forte et seul le génois nous propulse,  pas mieux bien sûr que celle à laquelle je pense qui dispose du chant mélodieux d'un V12 bi-turbo, 48 soupapes, 8 vitesses séquentielles, châssis Carbone, surbaissée et soubassement à effet de sol, avec cuir intérieur blanc cassé et Hi-fi Sound-Round à équaliseur incorporé…Mais on avance quand même pas mal….

 

A cause du balancement incessant, dû au tangage et à la gîte, nos repas sont pris sur "le pouce",  le plus souvent, ce qui nous évite de se ramasser l’assiette pleine sur les genoux  (entrée, viande, légumes, dessert) comme s’est déjà arrivé et plus grave de renverser nos verres dont certains (que vous reconnaîtrez sans doute) les ont remplis d’un précieux liquide qui tâche.

 

 

(La mort du démarreur)

 

Samedi 15 janvier, cette fois, c’est pas de vent, je me prépare à un petit coup de moteur, mais le démarreur cliquette, décliquette, recliquette et finalement de la fumée sort du capot moteur avec une odeur de brulé caractéristique d’un feu d’origine électrique…Rapidement je coupe toute l’alimentation électrique du bord en attendant que l’odeur se dissipe, les dégâts sont minimes et si limitent à du noir de fumée dans le compartiment moteur.

 

Le démarreur est hors d’usage, et impossible de redémarrer, j'ai essayé quand même de le faire partir avec un "bout" enroulé sur la poulie du vilebrequin, là où se trouve les courroies d'entrainement, j'ai eu beau tirer d'un coup sec, aussi de  le relier à la bôme et virer pour l'entrainer, rien n'y fait, la compression du moteur est trop importante…Eh bien il faudra se débrouiller uniquement avec nos voiles, quelque soit le sens d'où vienne le vent.

 

 Dimanche 16 janvier, encore une heure de décalage sur le fuseau horaire. A force on rajeunit, (tout ce qui arrive en métropole, eh, ben, c'est pas encore là…)

 

Jamais on a étés aussi près du but depuis notre départ, (vu qu'on n'a pas fait demi-tour…)

 

 

(Terre)

 

A 18 heures la terre est en vue….Ca faisait longtemps!…. La Martinique est enfin à notre portée, nous l’atteindrons certainement dans la nuit, après le contournement au large de la pointe des salines et de la pointe Dunkerque,  j’escompte mouiller vers Ste Anne, la ville la plus proche pour passer la nuit.

Bientôt nous pourrons prendre une vraie douche, enfin. Marcher sur du "fixe", manger d'autres choses que des boites de conserves, se débarrasser de nos poubelles, retrouver un confort relatif d'un niveau plus conventionnel avec nos valeurs inculquées depuis qu'on est petits (on l'est toujours…petits…), échanger des propos et nos impressions avec des humains d'ici où d'ailleurs et découvrir cet endroit dont nous rêvions depuis longtemps.

 

Ensuite s'occuper du défunt démarreur dont nous avons recueillis le dernier souffle au cours de son ultime prestation où il cliqueta et décliqueta de nombreuses fois avant de rendre son âme aux dieux de la mécanique métallique et électrique régnants sur ce monde, (qui côtoient ceux de l'organique et les autres…)

L'autopsie  révélera un court circuit fatal ayant entrainé la rupture quasi immédiate de la fourchette d'entrainement en plastique d'acétate de téflon acrylique supposé du lanceur, entrainant sa mort quasi instantanée, il n'a pratiquement pas souffert…. Néanmoins, le spectacle est horrible, des traces brunâtres témoignent de la violence des conditions électromagnétiques qui régnèrent en ces pénibles circonstances, l’intérieur à fondu et donc, la défaillance de l'élément vital dans le processus concernant l'élaboration de mise en route de sa fonction en affectant de manière irrémédiable par là même le but attribué à tous les démarreurs de ce type de part le vaste monde, à savoir "mettre en route les moteurs " quand on en a besoin!…

 

 

(Un peu d'histoire)

 

Les Antilles autrefois peuplées d'indiens "Arawak "qui était un peuple pacifique vivant de pêche, de culture, pratiquant l'art de la poterie, fumant le tabac, se relaxant dans leurs hamacs, faisant des barbecues fut attaqué à compter du XIIème siècle par les indiens cannibales "Caraïbes" (ou Karibs, ou Kalinas), originaires d'Amérique du sud, conquérants et guerriers redoutables.

Jusqu'au 12 octobre 1492 où Christophe Colomb arriva avec ses  trois Caravelles,  la Pinta, la Niña et la Santa Maria, il pensa être arrivé aux Indes d'où le nom "d'Indes Occidentales"  devenu "West Indies" par les Anglos saxons suivis  dès le XVIème siècle par les Français, Hollandais et autres Européens.

Les Espagnols délaissant les petites Antilles pour aller chercher de l'or sur le continent sud Américain, les autres (Corsaire, Pirates, Flibustiers), restèrent aux Antilles afin d'intercepter les galions Espagnols chargés d'or  en arborant le "Jolly Roger's" fameux pavillon des pirates sans foi, ni loi.

Puis vint le temps des colons où les épices, le sucre tiré de la canne à sucre, puis de "Tafia" et ensuite de "Rhum" et diverses plantations exigeant de la main d'œuvre, engagèrent des Indiens, puis firent venir des esclaves d'Afrique.

Les guerres incessantes opposant la plupart du temps les Français et les Anglais se termineront après le traité de Paris en 1815, l'abolition de l'esclavage intervint pour la France en 1848 sur l'instigation du député Victor Schœlcher, puis la Guadeloupe et la Martinique devinrent département Français d'outre mer, St Barthélémy et St Martin (partie Française) collectivités Françaises d'outre mer, les ex îles Britanniques  sont indépendantes, d'autres toujours rattachées à la couronne bénéficient du statut d'autonomes, comme également les îles vierges

Américaines et les Hollandaises, puis dès janvier 2011 Pierre et Ghislaine débarquent…

 

 

 

*      10) L'Arrivée.

 

 

Lundi 17 janvier, vers 3 heures du matin nous arrivons enfin en vue des lumières de la Martinique, pour l'approche finale tout l’équipage est à la manœuvre, (c'est-à-dire nous deux…)

 

Quand tout à coup, un grain violent s’abat violement sur nous, la pluie, le vent dont des rafales dépassent les 35 à 40 nœuds, les vagues se renforcent, secouant furieusement "Erreip" et son équipage, ainsi tout ce qui n'est pas solidement amarré à son bord…

 

 

(Plantés)

 

Hâtivement nous virons, bateau face au vent, vite: rentrer de la voile, reprendre le cap et ô surprise il est impossible de reprendre la route car le bateau est comme "scotché" sur place à  plus de 2 milles de la côte et par 14°23' N et 60°55' Ouest sur plus de 600 à 700 mètres de fond, la barre est devenue inefficace et nous n’avançons pas d’un mètre, simplement le bateau gite dans la bourrasque et le vent sans bouger de l'endroit…Nous avons certainement accrochés quelque chose…

 

Au bout de plus d’une demi-heure sans aucuns résultats, sans avoir rien vu avec nos lampes dans l'obscurité, malgré nos efforts pour savoir ce qui nous retient ici alors que les fonds sont profonds et sans la possibilité de mettre le moteur en marche depuis la mort irrémédiablement fatale du démarreur.

Il faut appeler le " CROSSAG " (Centre Régional Opérationnel de Surveillance et de Sauvetage Antilles-Guyane) à la VHF sur le canal 16 pour venir nous remorquer.

 

 

(Ouf!...)

 

Ils répondent de suite qu’ils envoient un bateau sur place au lever du jour, nous patientons donc jusqu’au petit matin en communiquant notre position heures par heures, puis petit à petit on se rend compte que nous dérivons lentement vers le "rocher du diamant", ce grand roc volcanique isolé qui forme un promontoire de 175 mètres de haut, vers six heures du matin, arrive enfin le canot qui vient nous tracter, ils envoient un filin et nous conduisent vers la zone de carénage de la ville du Marin où "Erreip" sera sorti de l’eau sur l’aire technique pour réparations et du coup nous ferons le carénage de la coque, pas de dégâts notoires mais les traces sur le safran ne laissent aucun doutes sur le fait que nous ayons accroché un objet flottant non identifié qui se serait détaché ensuite et restera un mystère.

 

Dire qu'il aurait été préférable d'une arrivée plus glorieuse serait plus juste, mais nous sommes là et avons réussis notre traversée, in fine, c’est le principal. Le but est atteint, notre trace dans l'eau ne sera pas pérennisée à tout jamais et se refermera, si ce n'est déjà fait, (il faudra que je regarde….)

 

 

(Tra-la-la….eeee!....)

 

Voici venu, le temps du soleil, de la chaleur là, où sous ces latitudes, une fois sortis de leur abri contextuel, la durée de vie d'un glaçon adulte n'excède pas quelques dizaines de secondes, c'est aussi le temps des baignades dans l'eau à 28° et plus si affinités,  les cocotiers sont bien présents le long de la côte, exhibant fièrement leurs noix, les épices exaltants mille parfums odorants et envoûtants titillent nos narines excitées, la diversité de la faune sous marine d'une variété insoupçonnée anime notre curiosité, les oiseaux de mer tels Frégates aux larges ailes déployées et Pélicans se partagent un ciel d'azur, notre vue s'enivre des fleurs éclatantes de couleurs et aux senteurs tropicales émouvantes, les fruits exotiques aux goûts inconnus que nos papilles découvrent, les plages idylliques ornées de sable fin nous fascinent, les musiques aux sons et rythmes endiablés cadencent notre gestuelle comportementale,  les découvertes de ces îles paradisiaques est une communion avec cette nature sauvage, dans cet espace-temps au milieu duquel nous ne sommes que les éphémères passagers en ridicule maillot de bain acrylique une pièce dont la couleur pastel lambda ne peut rivaliser avec cet environnement éclatant de lumières contrastées où la représentation enchanteresque nous transporte tel: l'archange besogneux dont l'essentiel de la tâche se résume aux rigoureux transferts d'âmes inconscientes dans les brumes astrales et lointaines d'un improbable infini céleste qu'est vachement loin…

 

N'empêche que !….Le bonheur d'avoir réussi ce parcours d'aventures par nous-mêmes sans le recours d'un vol régulier par avion transatlantique ne nous aurait pas permis ces rencontres inoubliables et ces relations captivantes avec les personnes et les animaux croisés durant tout ce voyage, pouvoir bénéficier d'une expérience de cette nature est une satisfaction sans égal.

 

 

 

 

PS: A la radio, d'après la météo, en France, ça ne s'arrange pas, il neige!….

 

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